Un peu comme nous durant les vacances, Marc nous présente Jésus qui retourne dans sa patrie et en profite pour reprendre contact avec les gens de son village, pour échanger avec eux à la synagogue comme, jadis, nous retournions à l’église de notre enfance pour revoir le monde. Voici donc le p’tit gars de Nazareth, simple fils d’ouvrier, qui parle comme un sage et, à ce qu’on dit, accomplit des prodiges remarquables. Frappés d’étonnement, de nombreux auditeurs disaient : « D’où cela lui vient-il ? Et quelle est cette sagesse qui lui a été donnée? » (Marc 6,2). Wow! D’autres traductions utilisent les termes ébahis, stupéfaits, pour mieux rendre la dimension de choc, d’impact de la racine grecque ἐκπλήσσω. Ça brasse fort à Nazareth, sauf que… bien des gens au lieu d’être secoués de leur inertie s’enfargent pour ainsi dire dans les fleurs du tapis. « Ça s’peut pas, on le connaît lui, pour qui y s’prend. » On trouve des motifs de réfuter ce qui est pourtant flagrant, de disqualifier ce qui est ressentie en sa présence selon la disponibilité du cœur. Il était pour eux une occasion de chute [scandale]… On pourrait résumer l’opposition méfiante à l’enseignement de Jésus par cet adage bien connu : « A beau mentir qui vient de loin »[1]. Précédé par sa notoriété, il est en bute aux attentes et aux résistances mesquines de ceux qui croient le connaître et considèrent ne rien avoir à apprendre de lui.
[Jésus] s’étonnait de ce qu’ils ne croyaient pas (Marc 6,6), étonnement qui a ici pour racine grecque le terme θαυμάζω, l’émerveillement, l’admiration. Qu’est-ce qui l’impressionne ainsi ? L’intensité de la foi du centurion dont les paroles suscitent son admiration, en Luc 7,9 (même racine grecque) ; et, dans le cas présent, la profondeur du blocage d’un préjugé qui prive les gens de recevoir la bonne nouvelle qui leur est destinée. Wow, peut-on être si borné? C’est fascinant, Un prophète n’est méprisé que dans sa patrie, parmi ses parents et dans sa maison (Marc 6,4), ce qui a donné le dicton inédit mais bien connu : « Nul n’est prophète en son pays »[2].
Il n’en va pas autrement pour Paul, le visionnaire, privilégié dans son expérience spirituelle qui pourrait en vérité se vanter mais qui ne souhaite pas le faire. Ce n’est pas en imposant d’autorité qu’on suscite l’adhésion du cœur mais par la transparence de qui l’on est, à travers ce que l’on fait. Aussi mettrai-je ma fierté bien plutôt dans mes faiblesses, afin que repose sur moi la puissance du Christ… Car lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort. (2 Corinthiens 12,9.10)
Gardons cela à l’esprit durant nos visites et échanges avec nos familles et nos amis. Le témoignage le meilleur n’est pas nécessairement le plus éclatant. C’est l’œuvre de Dieu et son heure : Ma grâce te suffit ; ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse… (2 Corinthiens 12,9). Amen.
LECTURES BIBLIQUES
[1] Voilà une expression proverbiale dont le sens est limpide, citée par le Dictionnaire de l’Académie Française de 1694. https://www.expressio.fr/expressions/a-beau-mentir-qui-vient-de-loin
[2] Il nous faut remonter loin pour trouver l’origine de cette expression, puisqu’on en trouve la trace dans les évangiles. https://www.expressio.fr/expressions/nul-n-est-prophete-en-son-pays
Un commentaire