Si seulement nous devenions un peuple de prophètes…!

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Être le plus grand dans le royaume! Ce thème revient aussi au chapitre suivant de Marc lorsque Jacques et Jean demandent à Jésus d’avoir une place importante au ciel.

Désirer les honneurs, les premières places, c’est naturel. J’ai grandi dans un monde compétitif dans mon village au nord du Québec. Tous les ans on remettait un trophée à l’athlète s’étant le plus illustré, tous sports confondus. C’était aussi un endroit où régnait la violence. Pour te faire une place, tu devais savoir te battre.

Dans le contexte de l’époque, les disciples attendaient un royaume terrestre, un roi guerrier de la lignée de David. Il pouvait être tout naturel pour eux, de se demander quelle place ils auraient dans cette armée. Les autres modèles qu’ils avaient autour d’eux étaient aussi les athlètes de l’époque, les élites juives et leur hiérarchie notamment.

Jésus répondra aux disciples: « Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous. » La compétition peut être saine en soi. Mais, il peut arriver que le désir d’être le premier engendre aussi le désir de vouloir dominer et écraser l’autre. Aussi, au plan sociologique, comme le disait le champion québécois de Triathlon Pierre Lavoie, l’accent mis sur la compétition discrédite ceux ou celles qui ne gagnent pas et cela n’encourage pas les enfants à bouger et être en forme. Pensons à l’époque quand nous étions jeunes, où l’on formait des équipes pour jouer à un sport ou simplement au ballon dans la cour d’école. Pour ma part, je n’étais pas pris le premier ni le dernier, mais pour la dernière personne choisie, cela pouvait ne pas être agréable pour elle. Surtout que cette situation risquait de se reproduire.

Que celui qui veut être le premier soit le dernier et le serviteur de tous. Jésus ajoute en Marc 10, 42 « Vous le savez, ceux qu’on regarde comme les chefs des nations les tiennent sous leur pouvoir et les grands sous leur domination. 43 Il n’en est pas ainsi parmi vous. Au contraire, si quelqu’un veut être grand parmi vous, qu’il soit votre serviteur. » – Jésus propose un changement de paradigme aux disciples. Il va encore plus loin et leur donne un exemple visible. Jésus met un enfant au milieu d’eux et dit que celui qui fait une place à cet enfant le reçoit lui-même. Il met la personne vulnérable, humble, enseignable, qui n’avait pas de statut à l’époque au centre de la discussion. Cela a dû être tout un choc pour les disciples d’entendre cela.

Au chapitre suivant, Jésus va bénir les enfants qu’on lui amène et demande que la foi des disciples soit comme eux. Jésus renverse le paradigme de la pyramide du pouvoir. Qui étaient les gens importants au temps de Jésus? : l’empereur, le sanhédrin (tribunal juif), les groupes religieux (pharisiens, saducéens) et en dessous les hommes et en dessous les femmes et les enfants. Jésus renverse cette pyramide et demande à ses disciples de faire de même. Au chapitre précédent, il demande aux disciples de quitter leur maison, de perdre leur vie pour le suivre.

Paul en Philippiens mentionne que Jésus s’est dépouillé de sa puissance pour se faire serviteur de tous. L’Église devrait être un lieu où le pouvoir s’exerce différemment. Être des leaders/serviteurs. L’Église devrait même donner plus d’honneur à ceux qui en manque comme Paul l’écrit en 1 Cor 12, lorsqu’il est question des parties du corps et de leur utilité. Il y a tellement d’abus de pourvoir autour de nous, frères et sœurs.

Que l’Église, notre famille, notre couple soit des lieux d’apaisement, d’accueil, de repos et d’égalité relationnelle.

Mais revenons dans l’évangile de Marc. Plus loin dans le texte, Jean, l’un des douze, dit à Jésus : « Maître, nous avons vu quelqu’un qui chassait les démons en ton nom et nous avons cherché à l’en empêcher parce qu’il ne nous suivait pas. » 39 Mais Jésus lui répond : « Ne l’empêchez pas, car il n’y a personne qui fasse un miracle en mon nom et puisse, aussitôt après, mal parler de moi. 40 Celui qui n’est pas contre nous est pour nous. Et celui qui vous donnera un verre d’eau au nom de votre appartenance au Christ, amen, je vous le dis, il ne restera pas sans récompense. »

Nous avons aussi lu dans le livre des Nombres au chapitre 11, que Josué demanda à Moïse d’empêcher ceux qui n’étaient pas avec eux de prophétiser. Et Moïse de répondre : «Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes!» Comme la dit la théologienne Marie-Noelle Thabut dans un commentaire, Moise en choisissant 70 anciens pour l’aider dans sa tâche, n’a plus le monopole de l’Esprit et souhaiter que tout le peuple devienne prophète, c’est dire déjà, le dernier mot du dessin de Dieu. Elle poursuivra en disant que la Pentecôte se profilait déjà au Sinaï. Le prophète était celui qui apportait un éclairage sur ce que pouvait vivre le peuple juif, le prophète était une lumière dans les ténèbres. Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes!» Quelle déclaration de Moise!

Moise et Jésus invitent à la tolérance et à l’ouverture envers ceux et celles qui sont différents de nous, qui ne font pas les choses comme on le voudrait. «Il n’est pas des nôtres!». On pourrait dire que l’objection de Jean est celle de toutes les personnes fermées aux autres. C’est la tentation d’un esprit sectaire. C’est comme-ci Jésus leur disait «Ne les empêchez pas, acceptez la diversité, respectez ceux et celles qui sont différents de vous». Le Christ veut élargir la vision trop étroite des disciples. Pour nous, ont peut aussi penser: «Ils ne sont pas des nôtres! Lorsqu’on regarde autour de nous. On peut vouloir éviter toutes discussions avec ceux qui ne sont pas dans notre camp. Au plan religieux, politique et social.

Au plan ecclésial, il est vrai que nous faisons partie d’une famille d’église qui a des caractéristiques que nous aimons, auxquelles nous adhérons. On pourrait penser que nous sommes rendus, qu’on est évolué, que nous n’avons plus rien à changer dans notre façon de penser ou de faire. Frères et sœurs, nous sommes fiers de la famille d’Église à laquelle nous appartenons, mais Jésus nous invite à nous ouvrir aux autres. Continuons le dialogue avec ceux et celles qui ne pensent pas comme nous!

Jésus va encore plus loin. Il met la barre encore plus haute. Il leur demande de ne pas être un sujet de scandale pour ceux et celles qui croient en lui : « Si ta main, ton pied et ton œil sont une occasion de chute pour l’autre, coupe-les. » La forme littéraire utilisée ici est une hyperbole. Jésus ne demande pas à ces disciples de faire cela pour vrai. Une hyperbole est une exagération pour mettre en relief, pour montrer l’importance à ce qu’il est en train de dire. Je ne vais pas aller plus loin pour tenter d’expliquer pourquoi Jésus prend la main, le pied et l’œil comme exemple pour parler des occasions de chute. La langue n’y est pas mentionnée, lorsqu’on sait que nous péchons en parole bien souvent comme nous l’a rappelé Jean-Philippe la semaine dernière. Nous bronchons de plusieurs manières frères et sœurs et Jésus demande ici à ses disciples que leur comportement ne soit pas un sujet de scandale, de chute pour le plus petit qui croit en lui. Mais à quoi fait-il référence?

Le verset 50 vient peut-être apporter un certain éclairage, 50 Le sel est une bonne chose; mais si le sel devient sans saveur, avec quoi l’assaisonnerez-vous? (9:51) Ayez du sel en vous-mêmes, et soyez en paix les uns avec les autres. Vivre en paix les uns avec les autres. Le verset 50 suggère que l’on parle d’un contexte relationnel et peut-être même dans la dynamique du pouvoir comme nous l’avons vu plus haut.

Frères et sœurs, nous sommes invités ce matin à être des leaders/serviteurs. Nous sommes invités à nous encourager les uns les autres, à être sensibles aux personnes de notre entourage qui auraient besoin de cette reconnaissance. Nous sommes invités à être des prophètes! À être des lumières dans l’église et dans notre monde. Nous sommes invités à être accueillants et ouverts avec ceux et celles qui ne sont pas des nôtres ou qui ne pensent pas comme nous. Enfin, nous sommes invités à une certaine prudence dans nos comportements ou nos paroles face au plus petit qui croit en Jésus. Que le Seigneur nous éclaire et nous guide!

 

LECTURES BIBLIQUES

Nombres 11, 24-29

Marc 9, 33-50

Marc 10, 42-43

Philippiens 2, 4-8

1 Cor, 12, 22-25

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