Quel exemple pour nous toutes et tous, ce Joseph. Ne laissez-vous pas impressionner par le fait qu’il soit descendant du roi David. Selon Matthieu (1, 17), vingt-sept générations les séparent. En fait, par la lignée de mon arrière-grand-père biologique, prêtre anglican d’origine britannique, je suis plus proche du roi Charles qu’est Joseph du roi David. Joseph est un gars ben ordinaire… comme vous, comme moi. Et, par la grâce de Dieu, nous avons tout ce qu’il nous faut pour vivre comme Joseph a vécu… par la foi.
Joseph n’est ni un grand intellectuel, ni un maître spirituel. Il n’a pas fait de hautes études en théologie. Il n’a pas fui le monde pour vivre une vie de contemplatif dans un monastère en quelque part. Selon Matthieu, Joseph se démarque parce qu’il est droit. D’autres traductions disent « juste » qui veut dire bien ajusté, aligné sur la volonté de Dieu. Il est juste dans sa vie de tous les jours, dans sa vie bien ordinaire de charpentier.
Joseph n’est qu’un pion sur l’échiquier politico-religieux, là, où les puissants jouent des coudes pour dominer le monde. À vrai dire, il a beaucoup moins de pouvoir que nous qui avons le droit de vote et la liberté de manifester de différentes manières pour faire valoir nos opinions et nos aspirations. Que peut-il contre les rois Hérode de ce monde ? Mais il a quand même du pouvoir. C’est un homme dans un monde patriarchal. Il a le pouvoir de faire certains choix… peut-être pas en tout… on ne sait pas si épouser Marie était son choix. Il se peut fort bien que leur mariage ait été arrangé par les parents… une bonne affaire, un bon contrat entre deux familles. On n’a pas toujours le choix de ce qui nous arrive. Mais on peut choisir comment on réagit face à ce qui nous arrive. Marché conclu, Marie est considérée comme l’épouse légitime de Joseph (et disons-le, elle lui appartient). Il ne reste qu’à attendre le jour où Joseph amènera Marie vivre chez lui. Et voilà que Joseph découvre que Marie est enceinte. Il sait pertinemment que ce n’est pas lui le père. Quel affront ! Quelle déception ! Quelle trahison ! Qui de nous ne serait pas rouge de colère ? Imaginez ce que c’était dans une société comme celle de Joseph et de Marie où préserver l’honneur des familles est une valeur fondamentale ! Selon la loi, Joseph avait le droit de renvoyer Marie publiquement, d’infliger à celle qui l’avait déshonoré, une peine exemplaire : la lapidation (Deutéronome 22, 23-24), la peine de mort. Joseph fait un autre choix. Il est croyant est pratiquant. Sans doute connait-il ce verset de la loi : « Je place devant toi la vie et la bénédiction d’une part, la mort et la malédiction d’autre part. Choisis donc la vie et tu vivras, toi et ta descendance. » (Deutéronome 30, 19). Joseph ne choisit pas la vengeance. Il choisit la vie. Il fait le choix de leur donner à tous les trois, à Marie, à l’enfant qu’elle porte ainsi qu’à lui-même, une deuxième chance. Il décide de renvoyer Marie en secret. Elle ne sera pas lapidée. Elle continuera à vivre chez son père. Un moindre mal.
Un moindre mal parce que, oui, en la renvoyant, l’honneur de Joseph aurait été sauvé. Mais Marie, elle, n’aurait pas pu cacher à tout jamais sa grossesse. Et puis… choisir le secret… ce n’est pas vraiment choisir la vie. Les secrets finissent presque toujours par empoisonner petit à petit nos existences.
Comme beaucoup de femmes de sa génération, ma mère biologique a choisi la vie. Elle m’a mise au monde. Toutefois, elle et d’autres ont souffert à cause de ce secret gardé pendant des décennies. Aujourd’hui encore, au Québec et ailleurs, des prêtres et des pasteurs accompagnent des femmes en fin de vie qui sont toujours rongées par le secret d’avoir avorté ou d’avoir « empêché la famille ». Que des souffrances sont infligées là où les enfants de Dieu doivent garder secret leur orientation sexuelle ou leur identité de genre. Et en ce premier décembre, Journée mondiale de lutte contre le sida, souvenons-nous des personnes (toutes orientations et identités de genre confondues) qui ont vécu ou qui vivent encore dans la peur que le secret de leur diagnostique soit révélé. Et que dire de tous ces autres secrets de famille ? Tant de gens s’épuisent et se détruisent pour taire des histoires de dépendance, de pauvreté, de violence, de maladie mentale et j’en passe. Choisir le secret, c’est rarement choisir vraiment la vie.
Je crois que c’est ce que l’ange, le messager du Seigneur, essaie de dire à Joseph. « Ne crains pas de prendre chez toi, Marie, ton épouse… . » (Matthieu 1, 20) C’est le choix que Joseph finit par faire et sans aucun doute ce choix a-t-il un prix. Joseph l’a peut-être payé assez cher. Imaginez la réaction de ses parents, de ses chums. Il a peut-être même perdu des clients à cause de toute cette histoire qui devait paraitre si invraisemblable pour le monde autour de lui. Marie enceinte du Saint-Esprit, voyons donc ! J’imagine que personne ne l’aurait blâmé de suivre la loi et de faire valoir ses droits. Mais Joseph a choisi non pas de faire ce qu’il avait le droit de faire mais plutôt de faire ce qui était juste. Il y a plus de deux mille ans, par la grâce de Dieu, le choix Joseph, un gars ben ordinaire, comme vous, comme moi, a fait toute la différence au monde. Joseph a choisi sa famille : Marie et l’enfant qu’elle portait. Il a choisi de faire ce qui était en son pouvoir pour protéger son prochain le plus vulnérable. Grâce à ce choix, Dieu est à jamais avec nous et Jésus continue à sauver son peuple de ses péchés, de tout ce qui le sépare de Dieu.
En ce temps de l’Avent, prions que tous nos frères et nos sœurs choisissent à la manière de Joseph. Par la grâce seule, tous les humains vivront d’amour, il n’y aura plus de misère. Ce sera la paix sur la terre. Amen.
Un commentaire
De la bonne eau fraîche pour moi encore ce matin…
Merci Darla!