Jésus, à ses débuts, avait environ trente ans »
Cette mention-là de Luc — une des rares informations à propos de l’âge de Jésus — a de quoi nous faire réfléchir un peu aujourd’hui. À trente ans, nous sommes encore tout jeunes et nous avons la vie devant soi. En plus, c’est un âge critique où nous faisons des choix importants. Souvenez-vous par exemple de votre propre trentaine où vous avez fait des choix qui ont eu des répercussions sur le reste de votre existence. Pourtant… Pourtant, Jésus a terminé sa vie quelques années après son baptême.
Cette vie assez courte, quoique intense en amour et en foi, captiva plusieurs générations d’historiens et de théologiens. Nombre d’entre eux partirent en quête des rebondissements inconnus de la vie du Fils de Dieu. Si nous pouvions rassembler toutes les biographies et les autres bouquins essayant d’élucider la « vie de Jésus », je ne suis pas certain que nous aurions assez d’espace dans le temple pour les contenir. Cette fascination tient peut-être à l’origine d’un problème à la fois historique et tout à fait humain : de Jésus, nous ne connaissons ni la vie privée ni l’enfance en tant que telle.
Outre les récits de la nativité et cette anecdote où l’Enfant Jésus reste au temple, le mystère de son passé persiste. Il est difficile, du moins pour moi, de nous contenter de l’espace vide entre la naissance de Jésus et son baptême. Pour un homme qui a été plusieurs fois sur la couverture du magazine Time et qui est encore la figure centrale de tout un courant de spiritualité, nous pouvons être déçus de cette omission de la part des évangélistes.
Qui était-il, cet homme mort au mi tant de sa trentaine ? Qu’est-ce qui l’a mené à son baptême ? Ce sont des questions qui piquent ma curiosité et peut-être la vôtre aussi. Ce sont des questions tout à fait légitimes. Mais… ultimement, est-ce que ces questions sont vraiment pertinentes ? Pour nous en faire une idée, nous pouvons nous poser les questions suivantes : quel est au juste le sujet du passage que nous avons entendu dans l’Évangile selon Luc ? Quel est son message principal ?
Tout au long de la semaine, je me suis posé ces questions-là et j’en suis arrivé à une conclusion qui m’a un peu dérouté. J’en suis venu à considérer que, dans le texte que nous avons entendu, le baptême de Jésus est en fait d’importance secondaire comparée à la révélation qui lui est adressée :
Jésus, baptisé lui aussi, priait ; alors le ciel s’ouvrit […] et une voix vint du ciel : »Tu es mon fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré. » »
À celui ou celle qui prie, c’est-à-dire entre en relation avec le divin, se révèle le véritable message de l’Évangile : l’amour de Dieu pour sa Création et toutes ces merveilles que nous sommes. Le baptême, dans ce cas, ne constitue pas une fin, mais l’occasion propice d’une ouverture de soi. Il souligne une prise de conscience quant à la réalité d’un amour qui nous dépasse entièrement. Cela nous rappelle assurément les paroles du psalmiste que nous avons prononcées au début du culte : « C’est toi qui as créé mes reins ; tu m’abritais dans le sein maternel. Je confesse que je suis une vraie merveille. »
Avant même notre naissance ou notre baptême, nous étions aimés et désirés et nous le sommes toujours. En prenant compte de cette continuité de la grâce dans l’histoire nos vies, est-il pertinent, outre la curiosité, d’accorder de l’importance au passé de Jésus ? Le baptême de Jésus, tel que décrit dans l’Évangile, constitue avant tout une occasion pour mettre l’emphase sur l’amour et la grâce de Dieu pour chacun et chacune. Ce n’est pas un rituel qui change quoi que ce soit, mais qui permet plutôt de nous mettre à l’écoute d’une vérité de toujours. Ultimement, notre passé ou celui de Jésus n’a aucune importance aux yeux de Dieu.
msngBien que la grâce surabonde pour nous tous et toutes, je suis le premier à manifester quand même ma déception de ne pas connaître en détail la vie de Jésus. Néanmoins, cette omission-là me rappelle que la trajectoire de l’amour de Dieu pour moi ne dépend pas de mes oeuvres passées, actuelles ou à venir. Nous sommes aimés de Dieu qui nous considère, avec ou sans baptême, comme de vraies merveilles. Cela, il n’y a rien qui peut le changer. Rien, pour reprendre Paul dans l’Épître aux Romains, ne pourrait abîmer l’amour de Dieu ou nous séparer de lui.
Entre les lignes de ce baptême de Jésus se révèle en fait le coeur de la Bonne Nouvelle. Tout y est dit dans l’espace de quelques versets. Même l’espace vide entre la naissance de Jésus et son baptême déborde de la grâce du Seigneur. Que pourrions-nous demander de plus ?
Amen
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