Qu’est-ce qu’on fait asteure?

Église Unie St-Pierre et Pinguet https://www.stpierrepinguet.org/wp

Vous n’avez pas à connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité mais vous allez recevoir une puissance…vous serez alors mes témoins jusqu’aux extrémités de la terre. Actes 1,7-8

J’ai pris conscience tout récemment que le jeudi de l’Ascension est un jour férié dans la très laïque France. Quoi de mieux qu’un congé payé lorsque le Fils de l’homme qu’on peut considérer symboliquement comme le prototype de l’homme nouveau / de la femme nouvelle, prend lui-même congé ayant achevé sa tâche. Il est à propos de profiter du congé, là où il y en a, car si l’œuvre de Jésus ressuscité est accomplie, notre travail, en tant que disciples du Christ exalté, est loin d’être achevé bien au contraire. Pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel?1, demandent ces hommes en blanc qui dans la composition du récit des Actes ont la même fonction qu’aurait une bulle de réflexion silencieuse dans une bande-dessinée. « Bon… y’est parti. On s’en ennuie déjà… Mais qu’est-ce qu’on fait asteure? »

L’extrait de l’évangile de Jean entendu tout à l’heure nous propose quant à lui de suivre une sorte de monologue intérieur de Jésus sur ce qui est désormais central dans la vie de ceux et de celles qu’il est parvenu à rejoindre au plus profond d’eux-mêmes, à émouvoir, à transformer, qui savent maintenant que tout ce que tu m’as donné vient de toi, que les paroles que je leur ai données sont celles que tu m’as données. Ils les ont reçues, ils ont véritablement connu que je suis sorti de toi, et ils ont cru que tu m’as envoyé.2 Jésus est transparent de l’intimité même de Dieu et il montre que tous et toutes sont conviés à vivre de même manière : ceux que tu m’as donnés : ils sont à toi, et tout ce qui est à moi est à toi, comme tout ce qui est à toi est à moi, et j’ai été glorifié en eux.3

La disparition ‘physique’ de Jésus à l’Ascension affirme de manière imagée que dorénavant le rayonnement divin (la gloire) reposera dans les disciples Désormais je ne suis plus dans le monde ; eux restent dans le monde, tandis que moi je vais à toi. Père saint, garde-les en ton nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient un comme nous sommes un.4 Hommes et femmes touchés par Jésus sont alors appelés à assumer à leur tour ce mandat de faire connaître, partager et expérimenter la « Parole » qui fait la vérité sur soi-même, sur l’état du monde, sur le sens et la valeur de la vie, qui donne accès au salut. Consacre-les par la vérité : ta parole est vérité. Comme tu m’as envoyé dans le monde, je les envoie dans le monde.5

Alors qu’est-ce qu’on fait asteure? Depuis les premiers disciples, il y a bientôt 2000 ans de cela, jusqu’à ce jour toutes les générations de croyants se sont posées cette question. Envoyés dans le monde sans être du monde, celles et ceux qui avancent dans la mouvance de Jésus ont essayé à leur façon de partager dans des gestes de compassion et des paroles de libération cette expérience de salut, de pardon, d’espérance et de renouveau qu’ils avaient vécue par la grâce de l’amour de Dieu. Je pense que si nous sommes ici ce matin, c’est parce que nous aussi, nous nous reconnaissons dans cette expérience, parce que nous y avons au moins un peu goûté et que nous en voulons encore et toujours davantage : Maintenant je vais à toi et je dis ces paroles dans le monde pour qu’ils aient en eux ma joie dans sa plénitude.6 Cette joie ineffable est ce qui caractérise l’expérience spirituelle et elle semble n’atteindre sa plénitude que lorsqu’elle est partagée. C’est le fondement du témoignage, de la mission, un élan de joie à partager, gratuitement, généreusement : elle n’est jamais plus contagieuse et convaincante que lorsque qu’elle imprègne une vie dans des actes simples et désintéressés. Cette manière d’être est, selon le livre des Actes, associée à une puissance, celle du Saint Esprit qui viendra sur vous7. C’est la Pentecôte que nous soulignerons dimanche prochain.

Oui, mais… Rien ne semble avoir beaucoup changé depuis ce temps, et l’actualité de la dernière semaine nous révèle lamentablement les blessures de notre monde plus que jamais hargneux, égoïste; les résultats tangibles tardent à venir. En effet. Le point de vue des Actes est une proposition de réponse qui n’en est pas vraiment une : vous n’avez pas à connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité8. Alors concentrons-nous donc sur l’amour et les soins à prodiguer, ce qui est de notre ressort; nourrissons et dispensons la joie de l’Esprit qui nous est donnée, la saveur de notre existence. Et, en ce printemps qui arrive enfin, appliquons la leçon du psalmiste : Heureuse la personne qui se plaît à la loi du SEIGNEUR et récite sa loi jour et nuit ! Elle est comme un arbre planté près des ruisseaux qui donne du fruit en sa saison et dont le feuillage ne se flétrit pas.9 Heureuse de la joie même de Dieu. Amen.

St-Pierre 7e dimanche de Pâques « B » – 13 mai 2018 – Ascension du Seigneur

LECTURES BIBLIQUES

Psaume 1

Actes 1, 1-12

Jean 17, 6-19

1 Actes 1, 11

2 Jean 17, 7-8

3 Jean 17, 9-10

4 Jean 17, 11

5 Jean 17, 17-18

6 Jean 17, 13

7 Actes 1, 8

8 Actes 1, 7

9 Psaumes 1, 1-3

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