Pour moi, Joseph est un brillant exemple de quelqu’un qui croit en temps d’incertitude. Il m’inspire… et plus encore… il me donne de l’espoir pour l’humanité.
Oui, je le sais. On le considère souvent comme un personnage secondaire dans le récit de la nativité. Marie, les anges, les bergers, les mages sont à l’avant-scène. Dans une mise-en-scène sur Netflix, il serait probablement listé parmi les figurants. Et c’est justement pour cela qu’il me donne de l’espoir. Ce n’est pas une « super-star » du monde biblique. Joseph, c’est un ti-gars de Bethléem. Oui, il est peut-être un descendant du roi David, mais, gardons les choses en perspective… en termes de générations, je suis plus proche de la Reine Elizabeth II que Joseph du roi David. Joseph… c’est un gars ben ordinaire. Et c’est au cœur de sa vie on ne peut plus ordinaire de jeune fiancé que Dieu agit de façon extraordinaire. Pour son bien à lui mais aussi pour le bien du monde que Dieu aime tant. C’est dans la vie de tous les jours que Dieu fait infiniment plus que nous pouvons demander ou même imaginer (Éphésiens 3, 20). Que cela nous inspire la confiance. C’est dans la vie ben ordinaire de Joseph que Dieu accomplit la promesse annoncée par Ésaïe environ huit siècles plus tôt. (De toute évidence, le temps de Dieu n’est pas celui des humains) ! Que cela nous inspire la patience dans l’attente.
Joseph n’est ni un champion sur le champ de bataille, ni un influenceur auprès des masses, ni un grand orateur. En fait, l’une des choses à remarquer chez Joseph, c’est qu’il ne dit pas un mot. Il réfléchit beaucoup mais il ne dit pas un mot. Notre monde de nouvelles en bref et de messages instantanés ne serait-il pas bien différent si on réfléchissait davantage et parlait moins ?
Si Joseph n’avait pas pris le temps de réfléchir, que seraient devenus Marie et son enfant ? Dieu seul le sait. Tout ce que l’on sait, c’est que Joseph est le financé de Marie. À l’époque les fiançailles étaient un engagement marqué par la signature d’un contrat légal. Matthieu nous le dit explicitement. Aux yeux de la loi, Joseph est déjà considéré comme l’époux de Marie. Elle n’a juste pas encore emménagé avec lui. Joseph apprend qu’elle est enceinte. Et la seule chose dont il est certain, c’est que ce n’est pas lui le père. Il n’est pas difficile d’imaginer le scandale. Il n’y a pas si longtemps que ça au Québec, on renvoyait, on cachait les filles-mères. Et ce ne sont pas tous leurs enfants qui ont été adoptés par de bonnes familles.
Revenons à Joseph. Il devait se sentir trahi, en colère… contre Marie… et peut-être même contre Dieu. Je me demande si, comme croyant, les versets de l’un ou l’autre des psaumes attribués à David, son ancêtre, ne lui sont pas venus à l’esprit : « Jusqu’à quand, SEIGNEUR ? M’oublieras-tu toujours ? Jusqu’à quand me cacheras-tu ta face ? Jusqu’à quand me mettrai-je en souci, le chagrin au cœur tout le jour ? Jusqu’à quand mon ennemi aura-t-il le dessus ? Regarde, réponds-moi, SEIGNEUR mon Dieu ! Laisse la lumière à mes yeux… » En temps d’incertitude, on a souvent l’impression d’être plongé dans l’obscurité la plus totale, n’est-ce pas ? En temps d’incertitude, il est tout à fait humain de se sentir trahi, abandonné… même de Dieu. Et l’histoire de Joseph (tout comme les livres des psaumes et des prophètes) nous rappelle que la marque d’une personne juste n’est pas ce qu’elle ressent mais la manière dont elle réagit face à ce qui lui arrive.
Voilà une autre raison pour laquelle Joseph m’inspire. Face à ce qui lui arrive, de prime abord, deux options se présentent à lui. Il peut s’enfermer dans son sentiment de trahison et sa colère et exiger que justice soit rendue. Selon la loi, il avait le droit de répudier publiquement Marie. Sa grossesse serait jugée comme un cas d’adultère, une offense passible de lapidation (Deutéronome 22, 23-24). Mais Joseph ne laisse pas son sentiment de trahison et sa colère déterminer ses actions. Plutôt que de se venger, de s’arranger pour que tout le monde sache à quel point il a été lésé, plutôt que de faire ce qu’il a le droit de faire, il choisit de faire ce qui est juste.
Mathieu nous le dit d’entrée de jeu, Joseph est un homme juste. Comme je viens de le dire, cela ne signifie pas qu’il ne se sent pas trahi, qu’il ne ressent pas la colère. Cela veut dire qu’il agit selon les commandements de Dieu.
Une fois adulte, Jésus résumera les commandements en ces termes : « Faites pour les autres tout ce que vous voulez qu’ils fassent pour vous : c’est là ce qu’enseignent les livres de la loi de Moïse et des Prophètes. » (Matthieu 7, 12) C’est ainsi qu’on garde les commandements d’aimer Dieu et son prochain comme soi-même (Matthieu 22, 34-40). Joseph est juste parce que sa manière d’agir face à ce qui lui arrive est conforme à la volonté de Dieu. Joseph est juste parce que, dans l’incertitude, il cherche la façon la plus aimante de réagir face à ce qui lui arrive.
Il y a une autre affaire que j’admire chez Joseph : il laisse mûrir sa réflexion avant de passer à l’action. Il décide de renvoyer Marie discrètement. De cette façon, il lui évitera le déshonneur et lui offre la possibilité de faire sa vie avec le père de l’enfant. Toutefois, avant d’agir… il dort dessous. Et la nuit porte conseil. Un ange, un messager de Dieu, le visite et lui dit que la chose vraiment aimante à faire, ce n’est pas d’éviter simplement le scandale et le déshonneur… et de laisser quelqu’un d’autre dealer avec l’enfant qui n’est pas le sien. La chose aimante à faire, c’est de prendre soin de Marie et de son enfant, de faire ce qui était en son pouvoir pour protéger ces deux êtres vulnérables que Dieu avait mis sur son chemin.
Joseph a accepté. Et l’enfant qu’il a accueilli dans l’amour a changé le monde à tout jamais… de Bethléem, jusqu’à Québec et partout ailleurs.
Dieu n’a pas demandé à Joseph de sauver le monde, de monter une résistance à l’occupation romaine, de mobiliser des masses pour trouver des solutions à toutes les crises auxquelles ses contemporains faisaient face. Dieu a simplement fait de Joseph un homme juste… comme Dieu fait de nous, toutes et tous, par sa grâce, des hommes, des femmes et des enfants justes.
Joseph, un gars ben ordinaire, nous montre qu’il est humainement possible d’agir selon la volonté de Dieu. Il est humainement possible de laisser l’amour déterminer nos actions même lorsqu’on a été trompé, trahi, lésé. Ça m’inspire.
Non, ce n’est pas facile. Et on ne réussit pas toujours aussi bien qu’on voudrait. Mais c’est humainement possible, d’autant plus que, par sa grâce, Dieu nous donne de nous reprendre et d’essayer encore et encore de nous améliorer. Ça me donne de l’espoir pour l’humanité.
En temps d’incertitude, aimons les gens que Dieu met sur notre chemin comme Joseph a aimé Marie et son enfant. Aimer, c’est notre justice. Aimer, c’est suffisant pour transformer le monde à tout jamais. Amen.
LECTURES BIBLIQUES
Crédit image : Berna Lopez, Évangile et Peinture
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