Ce matin, on va commencer par un petit jeu. Je vais dire un mot…vous me dites la première chose qui vous vient à l’esprit, d’accord ? Autorité. (dénominateurs communs « expertise et pouvoir »). Alors regardons d’abord la notion d’expert. Qui sont les vrais experts ? Peu importe le sujet…il semble que…pour chaque expert qui confirme un « fait » ou une « vérité », il y a un autre qui démontre le contraire.
De plus, comme on vient de le dire, le mot « autorité » est souvent associé au pouvoir. Et, de nos jours, « le pouvoir » a mauvaise presse. Les hommes et les femmes « d’autorité » sont ceux et celles qui ont du pouvoir sur les autres. Les gens d’autorité utilisent leur pouvoir pour imposer leur vision du monde.
Mais comme l’extrait de l’évangile de Marc que nous venons d’entendre illustre bien, Jésus a une façon tout autre d’exercer son autorité. Marc nous dit que Jésus enseignait dans la synagogue et que les gens étaient frappés de son enseignement « car il les enseignait en homme d’autorité et non pas comme les scribes. » Les scribes étaient des « experts » des spécialistes des Écritures…des interprètes attitrés (des théologiens quoi). Et ils sont souvent présentés comme étant des hommes qui utilisent tout ce savoir pour essayer d’avoir du pouvoir sur les autres…Jésus le premier. Ils vont essayer d’utiliser leur savoir pour prendre Jésus au piège…pour limiter son pouvoir…son influence…et ultimement…pour l’éliminer carrément. Jésus ici, est présenté par opposition aux scribes…Jésus n’est peut-être pas docteur en théologie…mais c’est quand même un homme d’autorité.
Le mot autorité a la même racine en latin que le mot auteur…un mot qui veut dire « créer…promouvoir…produire ». Ce qui suggère qu’une personne d’autorité…c’est quelqu’un qui est capable d’envisager de nouvelles façons de vivre et de faire…quelqu’un qui est capable de créer de nouvelles possibilités…d’ouvrir de nouveaux horizons.
Alors…selon cette façon de voir les choses…qui ont été les figures d’autorité dans votre vie ? Je soupçonne que ce n’étaient pas des gens capables de sortir toutes sortes d’arguments implacables pour prouver…hors de tout doute…que leur façon de voir ou de comprendre la vie était LA BONNE ! Qui a été une figure d’autorité pour vous ? Cette semaine rendons grâce à Dieu pour ces gens qui ont été, à leur manière, le Christ pour nous – parce que, comme Jésus le fait, ces gens ont su ouvrir nos horizons…et nos yeux…pour nous permettre de voir tout ce que la vie avait à nous offrir.
C’est ça qui fait de Jésus un homme d’autorité. On le voit avec l’homme dans l’Évangile de ce matin. On ne sait pas ce qui l’afflige vraiment. (À l’époque, toutes sortes de maladies et de conditions physiques et psychologiques étaient attribuées à des esprits mauvais…mais l’impact était toujours le même…ces gens se voyaient exclus. Ils vivaient en marge de la société…non…ils ne vivaient pas…ils existaient). Cet homme dans l’Évangile de ce matin…on ne sait pas ce qu’il a…mais quelque chose le tourmente et fait en sorte qu’il est séparé de Dieu et de la communauté. Jésus dit seulement une parole…et il est guéri. Jésus en homme d’autorité…utilise son pouvoir non pas pour écraser…les autres…pour limiter leur vie…mais plutôt pour relever les autres pour leur ouvrir des possibilités sans limites…pour donner une vie nouvelle à ceux et celles qui étaient pris pour mort.
Oui, autorité et pouvoir vont de paire. Ni l’un, ni l’autre, n’est mauvais en soit. C’est ce qu’il fait avec son autorité et son pouvoir qui distingue Jésus des « experts » de son temps.
Et c’est ce qui distingue les disciples de Jésus des « experts » de leur époque. Prenons Paul, par exemple. Qu’est-ce que cette histoire de viande sacrifiée aux idoles a avoir avec l’autorité de Jésus ? Tout est une question de ce que l’on fait de son expertise, ou sa connaissance. La connaissance peut enfler…on peut s’en servir pour se promouvoir, se mettre au dessus des autres…les écrasant par le fait même. Ou on peut mettre notre connaissance au service du bien commun. Voilà ce en quoi consiste la vraie liberté. La liberté n’est pas la possibilité de faire tout et n’importe quoi… faire ce que l’on veut, quand on veut. La vraie liberté, c’est pouvoir choisir entre ce qui détruit la communauté, et ce qui l’édifie ; entre son intérêt propre et le bien commun. C’est que ce Paul dit par rapport à la viande sacrifiée aux idoles.
Mettons toute cette question en contexte. À l’époque, Corinthe était une grande ville cosmopolite, où les gens de différentes traditions religieuses se côtoyaient. Si on voulait manger de la viande, on allait au marché acheter des surplus non utilisés à des fin cultuels. Mais les Chrétiens à Corinthe se demandaient si on pouvait en manger sans se faire complice de l’idolâtrie. En gros, Paul leur répond : « Les idoles…il n’y a rien là…il y a un seul Dieu. Un peu de viande, ça ne peut ni nous rapprocher, ni nous éloigner de Dieu. Donc, vous êtes libre de manger…ou de ne pas manger de la viande. Mais attention ! Que cette liberté ne devienne pas un scandale pour vos frères et sœurs. S’il y en a parmi vous qui voient les choses autrement et pour qui manger de la viande sacrifiée est un sacrilège, mieux vaut choisir librement de s’abstenir pour ne pas créer de conflits. La liberté, c’est aussi choisir de ne pas faire ce qu’on a le droit de faire pour le plus grand bien de toutes et de tous. »
Plus je réfléchis à tout ça, plus je me demande ce que cela veut dire pour la liberté d’expression, la liberté de religion et la liberté de presse…pour ne nommer celles-là. Je ne tenterai même pas d’y répondre maintenant mais on pourrait en discuter lors du partage après le culte si vous voulez. Chacun-e doit formuler sa propre réponse, en fait, c’est ça la liberté de conscience, si chère à la tradition protestante.
De nos jours, la question de la viande sacrifiée aux idoles n’est peut-être pas pertinente…mais la question de ce que nous faisons de notre liberté l’est certainement. Prenons garde que notre liberté ne devienne une occasion de chute pour nos frères et sœurs. Puissions-nous, nous aussi, vivre en femmes et en hommes d’autorité…à l’instar de Jésus, notre enseignant et notre maitre…en toute liberté. Amen.
Par Darla Sloan, le 1er février 2015 – 4 Épiphanie B15 – Église unie St-Pierre
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Lectures bibliques:
1 Corinthiens 8, 1-13
Marc 1, 21-28
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