Dans le silence, la Présence

Église Unie St-Pierre et Pinguet https://www.stpierrepinguet.org/wp

Je tiens mon âme égale et silencieuse ; mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère.[1] Psaume 131,2 [Bible de la liturgie]

« Avant de parler du silence, commençons par nous taire. » C’est ainsi que débute le commentaire de la 3e affirmation de la règle des sœurs de Grandchamp, Maintiens en tout le silence intérieur pour demeurer en Christ.[2]

Nous sommes sauvés par grâce, par cette bienveillante sollicitude de l’Éternel envers nous, aussi imméritée qu’inconditionnelle, un cadeau sans contrepartie. Jésus rend concret ce que cela signifie; il est Parole du Père, et prend littéralement corps dans notre condition humaine. Par sa vie, sa mort et sa résurrection, il nous ouvre à une existence nouvelle, la vie de l’Esprit; ainsi, le temps et les circonstances de notre existence deviennent le champ à labourer, à ensemencer, à désherber, à arroser, par nos gestes de créativité, l’utilisation de l’énergie vitale du Créateur canalisée dans nos talents et nos dons, nous qui sommes façonnés à son image, destinés à sa ressemblance.

Ce matin nous laissons donc retentir la Parole dans les cantiques, la proclamation biblique, les prières. Pour établir une communication fructueuse il convient que tout le monde ne parle pas en même temps. Dans le cas présent, cela doit même aller plus loin : non seulement faut-il nous taire, mais maintenir un silence intérieur. C’est un travail que chacune et chacun de nous doit accomplir personnellement. Il s’agit au mieux, avec patience et détermination, de créer un contexte optimum de réceptivité à la Présence divine, constante, mais que nous percevons de manière intermittente. Car cette Parole sacrée n’est pas d’abord une information à recevoir, une idée à concevoir, mais essentiellement une présence à accueillir et à laisser se déposer en soi.

Expérience ineffable, difficile à décrire, à laquelle fait allusion le texte du Cantique des cantiques, au moyen d’une poésie empreinte de sensualité : J’entends mon chéri ! Le voici : il vient… Il chante et me dit : Debout, toi, ma compagne, ma belle, et viens-t’en. Car voici qu’on voit des fleurs dans le pays; la saison de la chanson arrive et on entend la voix de la tourterelle. Debout, toi, ma compagne, ma belle, et viens-t’en.[3]

Si vous êtes comme moi, maintenir le silence intérieur est tout un défi. Les diverses pratiques de méditation invitent à ne pas devenir rigide, tendu, face à ce flot incessant d’idées et d’images qui sollicitent notre attention, mais plutôt à les laisser filer telles des feuilles emportées par le vent ou sur les eaux d’une rivière. Seule importe l’intention, l’ouverture du cœur, le désir de rencontre. Et le psalmiste nous offre une comparaison d’une sagesse aussi grande que tendre : mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère.[4] La quiétude de l’enfant sur le sein maternel, comblé d’y reposer, apaisé, pleinement satisfait. Cette relation fondamentale qui nous a tous marqués est une image puissante de l’habitation divine intérieure, demeurer en Christ. C’est par ce compagnonnage spirituel dont la Parole sacrée est l’aliment quotidien, que la vie nouvelle s’installe chaque jour un peu plus en nous. Notre cœur doit être renouvelé en profondeur car : c’est de l’intérieur, c’est du cœur des hommes que sortent les intentions mauvaises.[5] Et c’est par cette présence intime qui se dépose en nous et dans laquelle nous reposons que s’accomplit l’Écriture : aussi, débarrassés de toute souillure et de tout débordement de méchanceté, accueillez avec douceur la parole plantée en vous et capable de vous sauver la vie.[6]

Voici quelques extraits du commentaire de la règle de Grandchamp sur les bénéfices de cette tâche qui nous incombe :

Au milieu des agressions, des inquiétudes, des appels, le silence intérieur te permettra de rester conscient de la présence du Christ. Au cœur de ta personne, c’est Lui qui crée la paix. 

Dans cet état de silence, tu verras les réalités invisibles avec autant de force et d’éclat que les réalités visibles; tu seras affermi dans ta foi.

Tu ne vivras plus divisé, mais rassemblé dans l’amour du Christ. Pacifié et détendu, tu seras vraiment disponible, capable d’aimer, de pardonner.[7]

Concluons par les paroles de la lettre de Jacques : Qui s’est penché sur une loi parfaite, celle de la liberté, et s’y est appliqué, non en auditeur distrait, mais en réalisateur agissant, celui-là sera heureux dans ce qu’il réalisera.[8]

Qu’il en soit ainsi pour chacune et chacun d’entre nous.

Amen.

 

LECTURES BIBLIQUES

Cantique des cantiques 2,8,11-13
Psaume 131 [130 version Bible de la liturgie]
Marc 7, 14-15, 21-23

 

[1] Psaume 131,2 Bible de la liturgie

[2] 3e affirmation de la règle de Grandchamp, Tiers-ordre de l’Unité. Lors de la Semaine de l’unité des chrétiens en janvier 2021 nous avons fait connaissance avec les Religieuses protestantes de Grandchamp, en Suisse; depuis des décennies elles œuvrent à l’unité chrétienne en utilisant de manière simple les outils développés au fil des siècles par le courant monastique. Elles ont résumé en 4 affirmations ce qui pour elles constitue les balises d’une vie de disciple, ce qu’elles appellent la Règle.

[3] Cantique des cantiques 2,8.10,12

[4] Psaume 131,2b

[5] Marc 7,21

[6] Jacques 1,21

[7] Extrait du commentaire de la 3e affirmation de la règle de Grandchamp, Tiers-ordre de l’Unité

[8] Jacques 1,25

Un commentaire

  1. Michelle Langelier says: · ·Répondre

    Merci pour ce texte, il arrive à point dans ma vie. Oui, je dois calmer mon vacarme intérieur.

Ajouter un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *