Les textes d’aujourd’hui devraient comporter un avertissement préalable à la lecture semblable au classement de films par la Régie du cinéma : « Déconseillé aux jeunes enfants; 16+ Horreur, érotisme; violence, atteintes faites aux individus, sujets controversés (inceste, partouze), insistance sur certains détails pénibles, phénomène de psychopathologie ». Un peu heavy pour un dimanche matin quand on y pense. Et dire qu’on entend que les croyants pratiquants vont se faire bercer de fables rose bonbons.
Les extraits de la Bible inspirant cette réflexion sont donnés à la toute fin de la prédication. Afin de l’apprécier pleinement, il est préférable de lire, au préalable, les textes bibliques dans la version TOB, accessibles via le site http://lire.la-bible.net/. |
Si jamais c’était le cas, n’ayons plus de complexe : notre culte n’a rien d’une fuite hors des tragédies du monde, tout au contraire. Le Dieu de Jésus investit toute réalité pour la mettre pleinement en lumière afin de confondre les prétentions vaniteuses, abaisser les puissants, libérer les opprimés, élever les humbles et encore et toujours inviter à la transformation par la reconnaissance des fautes, la dénonciation du mal, l’appel à la repentance, la conversion du pécheur et la renaissance à une vie nouvelle de justice, de droiture, d’intégrité, de partage et de bonté.
Hérode, roitelet paranoïaque au service d’une superpuissance militaire et économique étrangère, avait fait arrêter Jean et l’avait enchaîné en prison. Hérode le craignait, sachant que c’était un homme juste et saint, et pourtant il le protégeait. Phénomène d’attraction/répulsion, une parole de vérité interpelle en profondeur et la personne concernée ne peut éviter de l’entendre résonner en elle : qu’en fera-t-elle? Jean est prophète, non devin : il proclame l’intégrité souhaitée par Dieu ce qui est, était et demeurera toujours le grain de sable dans tout engrenage et construction humaine. Sur la scène politique actuelle, au niveau local, national et international quelles sont les voix prophétiques qui s’élèvent ? Que disent-elles ? À qui s’adressent-elles ? Qu’ont-elles à nous dire personnellement ?
Quand Hérode l’avait entendu, il restait fort perplexe ; cependant il l’écoutait volontiers. Une parole véridique est troublante. Elle reste en nous. elle nous hante, elle continue à nous travailler intérieurement, dans les profondeurs du subconscient justement pour rejoindre notre conscience. Dirigeants, entrepreneurs, politiciens, décideurs ont des responsabilités collectives énormes qui se doivent d’être exercées avec rectitude. Les nombreuses commissions d’enquêtes et les dénonciations à tous les niveaux nous démontrent tristement combien le chemin de l’intégrité est ardu et comme il semble aisé de se laisser corrompre par l’avoir, le pouvoir, et de se réfugier/justifier dans l’illusion de la gloire, si éphémère soit-elle.
Alors, quoi de mieux pour embuer sa conscience et huiler ses relations que de faire un party? Lors d’un banquet à ses dignitaires, à ses officiers et aux notables de Galilée, la fille d’Hérodiade vint exécuter une danse et elle plut à Hérode et à ses convives. Le party à la romaine, ça ressemble à certains party de bureau, soirées de carnaval, de festival, partouze où les convives gavés de nourriture et de boisson se permettent de perdre la carte. Plus on est haut, plus semble-t-il on se laisse tomber bas. Le roi lubrique envers la fille de sa compagne lui promet littéralement la lune… Et pour ne pas s’auto-discréditer devant ses convives il accède à ce caprice délirant de tuer un juste, et ajoute l’horreur et l’irrespect d’apporter sa tête sur un plat. Combien d’atrocités ont été commises de la sorte au fil de l’histoire : alcôves des pires dégradations, des tortures et violences inconnues et impunies. De tels comportements basculent dans le mal de l’antique serpent, qui est le diable et Satan, et dévoilent la collusion de l’horreur sociale et du vice personnel, l’insensibilisation des cœurs intoxiqués, des consciences anesthésiés qui ont perdu le sens du bien, de la dignité, du respect dû à toute personne, et à l’égard de soi-même. Des bassesses qui n’ont rien d’humain, la Bête, donc absolument rien de divin, l’anti-Christ, ce qui est radicalement l’opposé de l’humanité voulue par Dieu.
Ce lugubre scénario ne se terminera toutefois pas ainsi. Le livre de l’Apocalypse propose aux chrétiens persécutés par un Empire à la dérive la révélation de l’aboutissement ultime de l’histoire de l’humanité, et ce en dépit de tous les triomphes immédiats du mal et de ses turpitudes : Satan, sera enchaîné pour mille ans, précipité dans l’abîme… pour qu’il ne séduise plus les nations. En dépit de toutes les variantes d’interprétation qu’on peut faire, ce 1000 ans nous dit qu’un nouveau monde est possible et cela pas juste un jour, ailleurs. Il y aura certes combat, comme c’est le cas maintenant comme toujours, mais Dieu par son Christ dans la puissance de l’Esprit sera victorieux et les enfants de Dieu avec lui : je vis des trônes. A ceux qui vinrent y siéger, il fut donné d’exercer le jugement. Je vis aussi les âmes de ceux qui avaient été décapités à cause du témoignage de Jésus et de la parole de Dieu, et ceux qui n’avaient pas adoré la bête ni son image et n’avaient pas reçu la marque sur le front ni sur la main. Ils revinrent à la vie et régnèrent avec le Christ pendant mille ans.
Amis-es, ne laissons pas notre joie s’éteindre ni notre foi défaillir devant le mal qui abonde. Par la prière, la fréquentation de la Parole de vie, laissons l’Esprit de notre baptême parler à nos cœurs et diriger nos comportements et nos pensées. Pour paraphraser la Confession de foi de notre Église : célébrons la présence de Dieu, vivons avec respect dans la création, aimons et servons les autres, recherchons la justice et résistons au mal, proclamons Jésus, crucifié et ressuscité, notre juge et notre espérance. Et s’il arrive jamais que, dans la fidélité au Seigneur, de manière métaphorique ou douloureusement réelle, nous soyons sous une forme ou une autre décapités, souvenons-nous que dans la vie, dans la mort, et dans la vie au-delà de la mort, Dieu est avec nous, nous ne sommes pas seuls. Grâces soient rendues à Dieu. Amen.
Denis Fortin, pasteur
Église Unie Saint-Pierre / 15e ordinaire « B » / 12 juillet 2015
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