Jésus Christ que vous aimez sans l’avoir vu, en qui vous croyez sans le voir encore…
1 Pierre1, 8
Cet extrait de la lettre de Pierre me paraît fort bien résumer la situation ce matin, en tout cas certainement la mienne pour ne pas vous imposer mon expérience et mes conclusions personnelles. Jésus Christ, je ne l’ai pas vu et je ne le vois toujours pas. Et pourtant, je crois et, encore mieux à mon avis, je l’aime…
Je ne tenterai pas de faire une présentation organisée d’extraits pertinents de la Bible non plus que d’énumérer les arguments théologiques élaborés au fil de siècles en espérant ainsi réfuter mes doutes (et peut-être les vôtres) et satisfaire de façon raisonnable mon intellect (et peut-être aussi le vôtre). Avec le passage des ans, je suis ‘passé’ d’une approche du style Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je n’enfonce pas mon doigt à la place des clous et si je n’enfonce pas ma main dans son côté, je ne croirai pas ! à l’attitude plutôt résignée du Mon Seigneur et mon Dieu. Remarquez bien ce n’est pas par vertu ou une foi hors du commun, loin de là. Mais à fréquenter les croyants, au fil des semaines, des mois, des décennies, à vivre l’Église et à découvrir dans des moments lumineux le Christ agissant dans mon frère, dans ma sœur, progressivement s’est comme installé en moi cette conclusion: ultimement il n’y a pas de démonstration convaincante autre que la disponibilité d’un cœur qui est touchée, qui résonne au message de l’Évangile, réceptif à la vibration divine dans la nature comme dans la communauté et qui saisit que le Ressuscité intègre l’humanité et le cosmos dans l’œuvre de recréation divine, le salut.
Les extraits de la Bible inspirant cette réflexion sont donnés à la toute fin de la prédication. Vous pouvez cliquer sur les liens pour lire les extraits. |
Avec le psalmiste, j’accueille chaque jour un peu plus, avec simplicité et humilité, ce qui monte en moi : Je bénis le SEIGNEUR qui me conseille, même la nuit, ma conscience m’avertit […] Aussi mon cœur se réjouit, mon âme exulte et ma chair demeure en sûreté […] Tu me fais connaître la route de la vie ; la joie abonde près de ta face, à ta droite, les délices éternelles. Ce compagnonnage intime, non rationnel mais profondément relationnel, voilà ce que je comprends être l’amour de Dieu déposé en nous comme une semence par l’Esprit. Et c’est de là, me semble-t-il, que la foi peut s’approprier progressivement ce qu’on qualifiait jadis du nom de « vérités révélées », le point de vue de Dieu, ces affirmations sur la vie, le monde, la destinée des humains, et la finalité de l’existence qui sont aussi l’objets d’opinions multiples et de spéculations innombrables autant que de quête incessante au fil des millénaires, dans toutes les civilisations.
Ainsi, ce matin, les paroles de Jésus ressuscité à Thomas sont comme une invitation à oser l’abandon du raisonnement pour risquer la réceptivité du cœur : bienheureux ceux qui, sans avoir vu, ont cru. J’y retrouve comme un écho, ce poème écrit en 1958 par le chansonnier Jacques Brel :
« Dites
Dites si c’était vrai
S’il était né vraiment à Bethléem dans une étable
Dites si c’était vrai
Si les rois Mages étaient vraiment venus de loin de fort loin
Pour lui porter l’or la myrrhe l’encens
Dites si c’était vrai
Si c’était vrai tout ce qu’ils ont écrit Luc Matthieu
Et les deux autres
Dites si c’était vrai
Si c’était vrai le coup des Noces de Cana
Et le coup de Lazare
Dites si c’était vrai
Si c’était vrai ce qu’ils racontent les petits enfants
Le soir avant d’aller dormir
Vous savez bien quand ils disent Notre Père quand ils disent Notre Mère
Si c’était vrai tout cela
Je dirais oui
Oh sûrement je dirais oui
Parce que c’est tellement beau tout cela
Quand on croit que c’est vrai. »
Cette présence, intimement ressentie, est souverainement l’initiative de Dieu, source et finalité de tout le cosmos. Par grâce seule. L’Évangile conclut ainsi : Jésus a opéré sous les yeux de ses disciples bien d’autres signes qui ne sont pas rapportés dans ce livre. Ceux-ci l’ont été pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour que, en croyant, vous ayez la vie en son nom.
Ce dont le printemps témoigne de façon intense bien que diffuse et mystérieuse, la résurrection de Jésus, attestée par la parole transmise, le prolonge et l’explicite. Nous, les humains, la création, le temps et l’histoire, sommes destinés : pour un héritage qui ne se peut corrompre, ni souiller, ni flétrir; cet héritage vous est réservé dans les cieux, à vous que la puissance de Dieu garde par la foi pour le salut prêt à se révéler au moment de la fin.
« Et si c’était vrai… » Et l’Esprit en moi m’a fait dire oui, « parce que c’est tellement beau tout cela quand on croit que c’est vrai. » Amen.
Par Denis Fortin, pasteur
Saint-Pierre / 2e de Pâques « A » 23 avril 2017
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