Elle est vivante, la Parole de Dieu, énergique et plus coupante qu’une épée à deux tranchants; elle pénètre au plus profond de l’âme, jusqu’aux jointures et jusqu’aux moelles.
L’auteur de la lettre aux Hébreux, vraisemblablement un disciple de Paul, se situe en droite ligne de pensée et d’enseignement des prophètes de la première alliance. Sa parole est sans compromis. Pas ici une parole timidement prononcée, pas un avis mollement énoncé, pas un éclairage qui ne change rien à la nature des choses. Non. Comme le souligne l’exégète français Albert Vanhoye, La Bible pense aux paroles qui changent le cours des choses : la parole du chef qui décide et ordonne, celle du vainqueur qui règle le sort de ses ennemis, celle du juge qui tranche un litige. Oui, la Parole de Dieu juge des intentions et des pensées du cœur. Elle révèle la personne en profondeur. Telle qu’elle est. Souvent infirme et faible. L’image utilisée par l’auteur de la lettre aux Hébreux est forte : en quelque sorte, il évoque la Parole de Dieu comme l’instrument de l’exécution d’un coupable. Pas une créature, écrit-il, n’échappe à ses yeux, tout est nu devant elle, dominé par son regard.
Les extraits de la Bible inspirant cette réflexion sont donnés à la toute fin de la prédication. Vous pouvez cliquer sur les liens pour lire les extraits. |
Naïvement, nous aimons bien croire en la Parole de Dieu et y adhérer, surtout quand elle rencontre nos valeurs et ne dérange pas nos aises. En effet, il faut bien se rendre à l’évidence : nous avons des jardins secrets qui ne sont pas toujours lumineux. Et il est bien légitime de souhaiter les préserver. Mais la Parole de Dieu (…) pénètre au plus profond de l’âme. Elle nous interpelle dans tous nos recoins les plus profonds. Oui, elle nous révèle en profondeur. Et nous incite à prendre position. Choisir de suivre Jésus et l’Évangile, c’est plus qu’obéir aux commandements. Oui, Jésus exige beaucoup plus. Il ne nous demande pas seulement de n’être pas méchant. Il veut plus que notre faiblesse. Jésus nous appelle au dépassement. À être une terre riche et féconde qui produirait du fruit en abondance. (Mc 4, 7) Et pour atteindre cet objectif ultime, il faut savoir nous débarrasser de ce qui nous encombre l’âme et le cœur, les soucis du monde, la séduction des richesses et les autres convoitises. (Mc 4, 19)
C’est ce que Jésus demande au jeune homme riche de l’évangile de ce jour. Et c’est ce que le jeune homme riche n’est pas capable de donner. Son cœur est pris ailleurs. Il n’est pas vraiment libre. Et le détachement lui semble insurmontable. Et ce jeune homme riche n’est pas si étranger à notre expérience de vie. Nous aimons bien nous sentir confortés par les valeurs évangéliques, mais notre adhésion dépasse-t-elle la communion de pensée? Sommes-nous meilleurs que le jeune homme riche? Ne devenons-nous pas tout tristes, juste à la pensée de nous sortir de nos torpeurs, de nos aises et de nos conforts? Exactement comme le jeune homme riche!
L’évangile n’est pas d’abord et avant tout un système de pensée ou une philosophie de vie. C’est un appel. Un appel personnel de Dieu qui nous est adressé. Et qui exige une réponse, pas une réponse rationnelle, mais une réponse de vie. Va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres et tu auras un trésor au ciel; puis viens et suis-moi. On est loin ici des bonnes et belles pensées. On est plongé dans l’action la plus concrète qui soit. D’abord un appel à la libération personnelle, à nous débarrasser de tout ce qui nous garde enchaînés à nous-mêmes, puis – et seulement après – suivre Jésus… là où Il voudra bien nous conduire. Et là où il veut nous conduire c’est auprès et avec les plus démunis, ceux qui ont besoin, ceux qui sont différents, ceux qui parfois nous rebutent.
Personnellement, je ne me sens pas souvent à la hauteur d’un si grand appel. Laisser à Jésus toute la place, laisser à l’autre dans toute sa différence prendre toute la place, ce n’est pas chose facile. Mais, fort heureusement, l’évangile est appel. L’évangile propose un idéal à atteindre. Une route à suivre. Il y a donc place au cheminement personnel. Jean Chrysostome disait : N’entreprenez pas de renoncer tout d’un coup à votre bien, si ce renoncement vous paraît trop difficile. Commencez par ce que vous pourrez, et montant ainsi de degré en degré, vous vous ferez une échelle sainte qui vous élèvera jusque dans le ciel.
Commencez par ce que vous pourrez. Au lieu de nous en aller tout tristes. Commencer quelque chose, nous mettre en route. Ne serait-ce que reconnaître nos limites, c’est déjà un pas dans la bonne direction. Et puis, progressivement, à la mesure de nos possibilités, nous approcher de l’autre et le laisser nous approcher. Comme Dieu s’est fait proche de nous en Jésus-Christ. Si proche qu’il est l’un de nous en toute chose, excepté le péché. Pour parvenir à répondre à l’appel de Jésus, nous comptons sur la force de l’Esprit de Dieu. Laissons-nous transformer. Laissons-nous transfigurer. Et nous aurons un trésor au ciel.
Pour le dimanche 21 octobre 2018 – Église Unie Saint-Pierre
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