Jésus, le berger qui nous fait nous reposer sur de verts pâturages, nous conduit vers des eaux du repos…aaaaaaah! Des images de Jésus comme on les aime. Combien de presbytères, de salles paroissiales ont eu, à une certaine époque, une image comme celle-ci accrochée au mur. Bébé, j’en avais une au dessus de mon berceau… que j’ai gardée dans ma chambre jusqu’à mon adolescence. Jésus qui veille sur nous, nous tient dans ses bras, même les moutons noirs parmi nous trouve leur place auprès de lui. (L’avez-vous remarqué?) Il y a de quoi de si rassurant là-dedans. Pas surprenant que cette image soit devenue si populaire. Mais elle donne une image idéalisée et incomplète de ce qu’est la communauté qui se rassemble autour de Jésus. Le rapprochement entre le Seigneur, notre berger du psaume 23 et Jesus, le bon berger dans l’Évangile de Jean, trace un portrait plus complexe du Seigneur, notre berger : Jésus-Christ est notre berger « tout terrain ». Oui, il conduit son troupeau près des eaux du repos, mais cela ne veut pas dire que le troupeau ne marchera plus jamais dans un ravin d’ombre ou de mort… ou qu’il n’y aura jamais de loups qui rôdent autour. (J’ai fait une petite recherche dans Google : dans les images du « bon berger » plusieurs moutons noirs, des moutons un peu égarés… mais aucun loup. Aucun danger apparent. Mais le psalmiste et Jean affirment que le berger est avec nous dans les ravins sombres et lorsque les loups nous surprennent!) Et oui, le berger dresse une table pour nous… mais… face à nos adversaires! Loups et agneaux à une même table… ÇA, c’est l’inclusivité, ça! Jesus nous fait nous asseoir à la table face à nos adversaires, confiants que nous ne manquerons de rien, que notre coupe sera toujours débordante.
Les extraits de la Bible inspirant cette réflexion sont donnés à la toute fin de la prédication. Vous pouvez cliquer sur les liens pour lire les extraits. |
La fin de semaine dernière dans le transport en commun j’ai croisé deux personnes – l’une a Montréal, l’autre à Québec – que j’avais connues dans deux communautés de foi différentes mais qui ne fréquentent plus aucune paroisse. Pourquoi? Parce qu’à un moment donné, le troupeau auquel ils appartenaient a marché dans un ravin d’ombre et de mort et selon eux, cela ne correspondait pas à l’image qu’ils s’étaient fait de la communauté qui se rassemble autour de Jésus. Mais faire partie du troupeau de Jésus, ce n’est pas s’inscrire dans une vie douillette où tout est toujours, dans les mots de Beaudelaire, « luxe, calme et volupté », n’est-ce pas? C’est avancer avec confiance dans la vie, peu importe le terrain sur lequel on se trouve. Et n’est-ce pas vrai que ce qui est vraiment rassurant, c’est un berger « tout-terrain », un berger qui veille sur son troupeau non seulement sur de frais herbages mais aussi au travers d’un monde hostile, traversé de disettes et de dangers? En fuyant le troupeau quand le terrain devient difficile, on peux éviter certaines embuches… mais pas toutes les difficultés. Et à la longue, on risque de découvrir qu’on s’est coupé d’une source de soutien justement au moment où on en avait vraiment besoin… car toute vie humaine traverse à un moment ou un autre des ravins d’ombre et de mort, n’est-ce pas? Parfois même lorsqu’on essaie de faire le bien.
Regardez ce qui arrive à Pierre et à Jean dans l’extrait des Actes que nous venons d’entendre. Il y a a peine quelques versets (1 Jean 3,1-4,4) Pierre et Jean s’en allaient au temple… et un mendiant les sollicite pour avoir un peu d’argent. Pierre lui dit qu’il n’a ni argent, ni or à lui donner mais qu’au nom de Jésus, il lui offre la guérison de son infirmité. Par la puissance du nom de Jésus Christ, Pierre le prend par la main et le fait lever. L’infirme trouve une vie totalement nouvelle par la puissance du Christ à l’œuvre en lui… et entre lui et Pierre. Les gens sont stupéfaits. Pierre fait une prédication percutante, beaucoup deviennent croyants! Résultat? Pierre et Jean se font mettre en prison. Les chefs, les anciens, les scribes et les prêtres veulent savoir à quelle puissance ils ont eu recours. Ils se révèlent ainsi sous leur vrai jour : ce ne sont pas de vrais bergers mais des mercenaires. Ils n’ont pas à cœur la vie et la sécurité du troupeau. Ils ne s’approchent du troupeau que dans leur propre intérêt. Le vrai berger ne cherche pas à conserver ses privilèges et son pouvoir sur le troupeau. Il se dessaisit de sa vie pour que ses brebis aient la vie en abondance… et pas le stricte minimum! Une table bien dressée et une coupe enivrante, débordante (selon la traduction)! Le bon berger se dessaisit de sa vie pour ses brebis et c’est ainsi que nous devons agir envers nos frères et sœurs. C’est ainsi que nous démontrons que nous sommes les brebis de Jésus. Le signe d’une vraie communauté chrétienne, n’est pas une communauté où tout est toujours « luxe, calme et volupté » mais plutôt une communauté « tout-terrain », une communauté où toutes et tous – même les brebis qui ne font pas partie du troupeau « dument constitué » – sont accompagnées dans de sombres ravins comme dans de verts pâturages, une communauté où même les adversaires ont leur place à la table, une communauté où on se dessaisit librement de sa vie actuelle afin qu’au nom et dans la puissance du Christ, on puisse la reprendre… mais autrement.
Et qu’est-ce que cela veut dire pour nous, concrètement, sur le plancher des vaches… euh… des brebis? C’est à chaque génération de chrétiens d’en discerner la réponse, je crois. Mais en cette Journée de la terre, je ne peux pas m’empêcher de penser que c’est à nous de choisir librement de nous dessaisir de notre vie – de certaines de nos habitudes et nos façons de faire – afin de la reprendre autrement, pour le bien des brebis de tous les troupeau et la création toute entière. Mais il y a sûrement autant de manières de manifester notre fraternel en Christ, qu’il y a de brebis en son troupeau. Oui, parfois le chemin est difficile. Oui, à différents moments, nous aurons sûrement à faire face à des adversaires et à traverser des ravins d’ombre et de mort. Mais le Christ nous a fait don de son Esprit. Son Esprit est à l’œuvre en nous et parmi nous et peut faire infiniment plus que ce que nous pouvons demander ou même imaginer. Qui aurait cru que Pierre, celui qui a renie Jésus trois fois aurait en lui la force de relever un autre par le nom de Jésus et le courage d’affronter des adversaires redoutables au nom de sa foi? Si son cœur l’accusait…Dieu était de toute évidence plus grand que le cœur de Pierre. Mes bien-aimés, il en va de même pour nous toutes et tous alors ne craignons rien. Avançons avec confiance. Quel que soit le terrain sur lequel nous nous trouvons, le Seigneur, notre berger est avec nous. Aimons-nous les uns les autres comme il nous a aimés. Saisissons à pleines mains la vie offerte… toujours nouvelle et éternelle. Amen.
22 avril 2018 – 4 Pâques B18 – Église Unie Saint-Pierre
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