« Tu es mon fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré1. »
Aujourd’hui nous pourrions dire que notre méditation du temps de l’Avent et de Noël trouve son aboutissement, que les annonces et les signes qui l’ont jalonnée arrivent à maturité. Comme tout le peuple était baptisé, Jésus, baptisé lui aussi, priait2. Solidaire de la vie comme de la démarche de conversion du peuple, Jésus assume sa destinée. Il reçoit lui-aussi le baptême de Jean. Et il priait dit le texte. Cette remarque, unique à l’évangile de Luc, me frappe. La prière est relation avec Dieu, le Créateur, le Père/Mère. Comme si l’eau du rituel avait avivé cette relation et que Jésus, dans cette rencontre éminemment intime, personnelle et mystérieuse, consentait à laisser se déployer en plénitude le mouvement de Dieu sur lui afin qu’il déborde et rejaillisse dans tout ce qu’il est, dans tout ce qu’il fait. Alors le ciel s’ouvrit ; l’Esprit Saint descendit sur Jésus sous une apparence corporelle, comme une colombe, et une voix vint du ciel : « Tu es mon fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré. »3
Les extraits de la Bible inspirant cette réflexion sont donnés à la toute fin de la prédication. Vous pouvez cliquer sur les liens pour lire les extraits. |
Cet aujourd’hui est effectivement comme une nouvelle naissance, celle de l’expression désormais actualisée de l’Esprit qui, par, avec et dans l’humanité de Jésus désire se diffuser en plénitude dans le Corps du Christ, intégrant dans sa grâce tous les humains, toutes les créatures, et même tout le cosmos, et ainsi tout ramener dans la relation première et ultime à Dieu, le Créateur aimant. Comme en témoigne des passages magnifiques de l’Écriture4, les premiers chrétiens ont eu l’intuition de la profondeur universelle et de la portée permanente de ce qui venait de se produire sur les rives du Jourdain alors que Jésus inaugurait son chemin de vie, l’annonce en paroles de grâce et en gestes de puissance de la Bonne Nouvelle du règne de Dieu où tous et toutes sont conviés et accueillis avec miséricorde et tendresse, inconditionnellement, par pure grâce.
Cet aujourd’hui est l’éternel maintenant de Dieu qui, secondes après secondes dans le flot de notre perception du temps, jaillit dans nos vies comme l’eau vive. Car notre propre baptême est communion à l’expérience de Jésus et nous incorpore au Christ, à tout le Christ, et cela que nous en ayons conscience ou pas. C’est ce que tente d’exprimer au mieux un de nos confessions de foi, Notre foi chante :
Avant que nous prenions conscience et que nous agissions,
nous naissons dans ce monde brisé.
Avant que nous prenions conscience et que nous agissions,
l’amour de Dieu nous entoure et nous sauve.
Le baptême d’eau au nom de Dieu trois fois saint
est le signe par lequel, à tout âge,
nous devenons membres de cette communauté d’alliance qu’est l’Église ;
ce qui figure notre renaissance en la foi,
notre renouvellement par la puissance de Dieu.
Le baptême représente autant la puissance de l’amour de Dieu
qui nous rassasie, nous soutient et nous transforme
que notre réponse toute de gratitude à cette grâce.
Mais cet aujourd’hui de Dieu semble trop souvent être drainé de son effervescence spirituelle. Au fil des siècles pour les communautés chrétiennes, au fil du passage des ans dans nos existences personnelles, il arrive que nous ressemblions, un peu beaucoup, à ces croyants de jadis, en Samarie, qui avaient seulement reçu le baptême au nom du Seigneur Jésus mais sur lesquels l’Esprit n’était encore tombé sur aucun d’entre eux5. Notre assemblée de ce jour est l’occasion de secouer notre torpeur. Reprenant à notre compte la prière des apôtres pour les Samaritains afin qu’ils reçoivent l’Esprit Saint, nous à qui on a autrefois dans le geste rituel imposé les mains, prions avec simplicité et humilité, ardeur et authenticité que le Père ranime en nous le feu de l’Esprit; qu’il rende actuelle comme jamais auparavant la vie du Christ en nous qui partageons le même baptême avec Jésus.
Et que notre quotidien, notre aujourd’hui, en soit renouvelé. À cet égard, je termine en empruntant es mots du Petit catéchisme, rédigé par Martin Luther au début du 16e siècle pour les familles chrétiennes. Le langage date bien-sûr mais la justesse du propos demeure vivifiante :
Qu’implique le Baptême dans notre vie de chrétiens?
Le Baptême implique que le vieil homme, qui est en nous, doit être noyé dans une contrition et une repentance de tous les jours, qu’il doit mourir avec tous ses péchés et ses convoitises, et que, tous les jours aussi, doit renaître en nous un homme nouveau, qui vive à jamais dans la justice et la pureté devant Dieu.
Où cela est-il écrit?
Saint Paul écrit aux Romains, au sixième chapitre: «Nous avons été ensevelis avec Christ par le Baptême en sa mort, afin que, comme Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, de même nous aussi nous marchions dans une vie nouvelle.» [Rom. 6:4]
Amen.
LECTURES BIBLIQUES
1 Luc 3, 22b
2 Luc 3, 21
3 Luc 3, 21b-22
4 Voir 1 Corinthiens 8, 6 ; 15, 28 ; Romains 8, 22 ; Philippiens 2, 10 ; Colossiens 1, 15-20 ; Éphésiens 1,10 ; 1,23 ; 4,10 ; 4, 13 ; Hébreux 1, 2-4
5 Actes 8, 16
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