« Elles sortirent et s’enfuirent loin du tombeau, car elles étaient toutes tremblantes et bouleversées ; et elles ne dirent rien à personne, car elles avaient peur. » C’est ainsi que se termine l’Évangile de Marc… du moins selon ce que les biblistes considèrent comme les meilleurs manuscrits de l’Évangile de Marc. Pas très vendeur pour un livre qui prétend présenter une la Bonne Nouvelle de Jésus Christ, Fils de Dieu (Marc 1, 1) Pas surprenant que plus tard, un ou des rédacteurs ont pris la décision d’ajouter une autre finale qui reprend les récits de la résurrection qui circulaient, notamment dans les autres Évangiles. Pour certains copistes, l’œuvre de Marc devait sembler inachevée. Pourquoi Marc aurait-il terminé son livre ainsi alors que l’histoire ne s’arrête pas là ?
Marc ne pouvait pas imaginer jusqu’où ça irait toute cette histoire… alors il la laisse ouverte… un peu comme si Marc disait à ses lecteurs et lectrices : « À vous d’écrire la suite avec Jésus, le crucifié-ressuscité qui précède ses disciples et Pierre en Galilée. »
Voilà la Bonne Nouvelle de Jésus Christ, Fils de Dieu. Voilà pourquoi Jésus est top ! Voilà comment il règne. Il ne règne pas comme un roi de ce monde qui s’impose et domine d’en haut pour marquer et préserver son territoire. Son règne a peu à voir, me semble-t-il, avec tous ces monuments (la statue du Christ Rédempteur de Rio, ou celle du Christ Roi de Lisbonne, par exemple) par lesquels nos ancêtres ont refait le crucifié-ressuscité à l’image qu’ils se faisaient d’un Christ Roi de l’univers.
Le Christ est top, non pas parce qu’il domine mais parce qu’il chemine. Rien ne peut lui faire obstacle pour toujours. La pierre est roulée. Jésus a pris les devants… avant même que les premiers témoins arrivent au tombeau. Leur peur et leur silence ne l’arrêteront pas non plus.
Quelle bonne nouvelle pour nous, n’est-ce pas ? Ne sommes-nous pas toutes et tous bouleversés régulièrement par ce dont nous sommes témoins ? Ne sommes-nous pas parfois effrayés par ce que nous voyons de nos propres yeux ? Et qui n’a jamais craint d’annoncer une nouvelle… même une bonne nouvelle… qui risquait de changer notre vie – et fort probablement celle de nos proches – à tout jamais ?
Peu importe la fin du manuscrit de Marc, l’histoire du crucifié-ressuscité ne se termine pas avec les peurs et les silences des deux Marie et de Salomé. Et ce n’est pas uniquement de l’histoire ancienne tout ça. Ce qui était vrai autrefois est encore vrai aujourd’hui. Nos peurs et nos silences n’empêcheront pas le Christ d’accomplir la volonté de Dieu pour nos vies.
Est-ce que, par la grâce de Dieu, les femmes ont fini par vaincre leurs peurs et trouver leur voix… et leur voie… ou est-ce que d’autres ont trouvé des mots pour dire ce que les deux Marie et Salomé ont tu ? Au bout du compte, ce qui importe c’est que la vérité sorte au grand jour. Le crucifié est ressuscité. Les dominations de ce monde n’auront pas le dernier mot. Jésus est top parce qu’il a renoncé à une vie de château, pour se laisser hisser sur une croix. Le Christ est top, non pas parce qu’il s’impose mais parce qu’il s’expose… aux pires épreuves imaginables. Il endure les pires souffrances afin que quiconque garde les yeux fixés sur lui ne se laisse pas décourager. Il y a un passage à travers les pires épreuves : la honte, l’humiliation la plus totale, les souffrances physiques, psychologiques, spirituelles les plus extrêmes. Il y a une vie nouvelle au-delà de ce qui nous tue… au sens propre comme au sens figuré. Le crucifié-ressuscité est top non pas parce qu’il est au-dessus de nous… mais parce qu’il va au-devant de nous… peu importe ce que nous avons fait ou omis de faire.
Voilà qui m’amène à un autre détail qui m’intrigue dans l’extrait de l’Évangile de Marc que nous avons entendu ce matin. Aux femmes bouleversées, effrayées, un messager dit : « Ne vous effrayez pas. Vous cherchez Jésus de Nazareth, le crucifié : il est ressuscité, il n’est pas ici ; voyez l’endroit où on l’avait déposé. Mais allez dire à ses disciples et à Pierre : “Il vous précède en Galilée ; c’est là que vous le verrez, comme il vous l’a dit.” » Pourquoi Marc prend-il la peine d’écrire « allez dire à mes disciples et à Pierre » ? Pierre n’est-il pas un disciple ? Se peut-il que Marc insiste au cas où on croirait que Pierre, ayant abandonné Jésus pour ensuite le renier trois fois, soit exclu de la communauté qui marchera à la suite du ressuscité. Se peut-il que Marc souhaite nous annoncer cette bonne nouvelle : peu importe ce que nous faisons ou omettons de faire, nous aussi, le Christ nous procède en Galilée, c’est là que nous le verrons, comme il l’a promis.
La Galilée, c’est le pays des disciples. C’est chez eux. C’est le lieu de leur rencontre avec Jésus et là où il a exercé la plus grande partie de son ministère. C’est là où tout a commencé et c’est à partir de là que la suite de l’histoire va s’écrire. Il en va de même pour nous. C’est au cœur de nos vies de tous les jours que nous rencontrons le Christ. Il nous précède sur tous nos chemins et c’est là où un chapitre inédit de l’Évangile s’écrit. Jésus est top, parce qu’il en est l’auteur.
Selon la Lettre aux Hébreux, Jésus est celui qui est l’initiateur de la foi (Hébreux 12, 2). Une autre traduction possible : Jésus est l’auteur de la foi. Jésus est l’auteur du récit de voyage qu’est notre cheminement de foi. Il est le commencement et l’aboutissement de notre histoire. Marc ne pouvait pas imaginer jusqu’où l’histoire du crucifié-ressuscité irait… pas plus que nous d’ailleurs. Toutefois, en gardant les yeux fixés sur celui qui nous précède partout où nous allons, par la foi qui nôtre et la grâce de Dieu, nous ajouterons certainement quelques pages à la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu, lui qui est le top des tops. Amen.
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