Le Royaume des cieux ressemble à ceci

Église Unie St-Pierre et Pinguet https://www.stpierrepinguet.org/wp

Le Royaume de Dieu, le Royaume des cieux, une utopie ? Non, plutôt un trésor, une démarche conduisant à la sagesse, au bonheur !

Ce matin, le texte tiré de l’évangile de Matthieu se trouve au chapitre 13. L’évangéliste reprend deux paraboles que Jésus utilisait pour enseigner des concepts spirituels aux gens qui le suivaient. Les paraboles du texte de ce matin cherchent à illustrer ce qu’est le Royaume des cieux, le Royaume de Dieu.

Pour plusieurs personnes du monde occidental, en 2020, la notion même de Royaume des cieux apparaît éloignée ou étrangère aux promesses du monde moderne. Un monde qui nous laisse croire, qui nous vend à grands cris, que le bonheur est à portée de main, à quelques clics de notre ordinateur, à quelques achats porteurs de joie, à quelques heures d’avion dans des contrées étrangères où nous pouvons prendre des autoportraits destinés à notre page Facebook. Le bonheur, on nous dit qu’on peut se l’acheter, l’obtenir à prix d’ami et, par la suite, le démontrer par la beauté et la richesse de nos biens ou de nos expériences.

Ayant l’impression d’avoir un accès si facile au bonheur, pourquoi alors, comme chrétien, rechercher un Royaume qui semble si lointain et qui apparaît avoir des exigences et comporter des risques. Nous avons lu ce matin : « Quand le filet est plein, les pêcheurs le tirent au bord de l’eau. Ils s’assoient. Ils ramassent les bons poissons dans des paniers et ils rejettent ceux qui ne valent rien. » (Matthieu 13 :48).

Parce qu’il existe une différence fondamentale entre le plaisir et le bonheur ou, encore, le Royaume de Dieu. Le moine bouddhiste Mathieu Ricard souligne :

“Tandis que les plaisirs ordinaires se produisent au contact d’objets agréables et prennent fin dès que cesse le contact, eudaimonia est ressentie aussi longtemps que nous demeurons en harmonie avec notre nature profonde [avec la nature profonde de la création][1]. Elle a pour composantes la liberté intérieure, la sérénité, la force d’âme, et l’amour altruiste, un altruisme qui rayonne vers l’extérieur au lieu d’être centré sur soi.”[2]

Le Royaume est cette forme de bonheur profond et réel qui se trouve gratuitement au plus profond de nous, de notre âme, de notre vie, mais qui exige une démarche consciente pour le trouver.

Certaines conceptions chrétiennes ont fait la promotion d’une théologie de la peur, la peur du jugement dernier, la peur de l’enfer, la peur du grand feu. Au jugement dernier, elles préviennent que l’accès au Royaume n’est pas pour tous et toutes… Elles assurent que si vous êtes des poissons sans valeur, vous serez jetés au feu ? Une façon violente d’exercer une pression sur les personnes pour qu’elles demeurent dans le droit chemin, qu’elles agissent en conformité avec le message évangélique du Christ. Une façon de convaincre les croyants d’agir de manière conforme pour avoir accès au Royaume de Dieu ici sur terre et, surtout, dans les cieux.

Des théologies de la peur qui occultent un élément essentiel, incontournable de l’enseignement du Christ, de son message libérateur et de l’amour annoncé. Dieu aime les hommes et les femmes qu’Il a créés de façon complète et inconditionnelle. D’ailleurs, dans la douleur extrême, la peine totale et l’humiliation sans nom, lorsque sur la croix, le Christ trouve des mots témoignant, de façon extraordinaire, l’essence de l’amour que Dieu a envers nous. Il pose ainsi un geste de réconciliation radical et sans nuances en disant : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Luc 23 :34).

Ainsi, il existe ainsi d’autres théologies qui visent à conduire à la même destination, au Royaume de Dieu. Ces théologies ne motivent pas par la peur, mais bien par l’amour, l’engagement personnel et la recherche continuelle du bien. Rappelons-nous que l’amour inconditionnel de Dieu, sa grâce infinie, son pardon généreux, son accueil radical et inclusif, son aide incessante et ses guérisons miraculeuses sont au cœur de l’action et de la vie du Christ.

Ce matin, nous avons lu aussi une lettre de Paul adressée aux Romains où, justement, il explique dans des mots simples et sans équivoque que « rien ne pourra nous séparer de l’amour que Dieu nous a montré dans le Christ Jésus, notre Seigneur. Ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les esprits, ni le présent, ni l’avenir, ni tous ceux, ni toutes celles qui ont un pouvoir, ni les forces d’en haut, ni les forces d’en bas, ni toutes les choses créées, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu ! » (Romains 8 :38-39).

Ainsi, le Royaume de Dieu n’est pas une récompense pour une vie exempte de péché, pour une vie sans taches. Nous ne serons jamais jetés aux feux de l’enfer. Non, le Royaume de Dieu n’est pas un lieu qui nous sera accessible seulement si nous agissons parfaitement en conformité avec les attentes de Dieu.

Aujourd’hui, Jésus présente le Royaume comme le fait de trouver un trésor qui génère une grande joie qui nous amène à tout laisser pour l’acquérir et le chérir. Il le présente aussi par l’action de pêcher le poisson et par l’action des anges qui font le tri dans les prises, pour garder les bons poissons et pour rejeter les mauvais. Ainsi, le Royaume de Dieu est un trésor caché qui a le potentiel de générer une grande joie. Il est aussi une activité nourricière (la pêche), qui a le potentiel d’assurer la vie en abondance. L’ange de Dieu est là pour nous guider, nous montrer, nous faire connaître le bien afin que nous puissions garder les éléments positifs de la vie. Ce tri est porteur, il est au centre de notre démarche personnelle, de notre quête spirituelle, mais comment fait-on ce tri entre les bons et les moins bons poissons que nous attrapons au cours de notre vie?

Une bonne façon de le faire, c’est en groupe par l’enseignement, l’entraide, la solidarité et la prière. Ici, l’Église, ou encore mieux, la vie en Église, en communauté, a une place importante. L’Église, avec ses imperfections, a le potentiel d’offrir un lieu de soutien mutuel, d’aide permettant de garder notre attention. L’Église, à son meilleur, permet à ses participants et participantes de maintenir vivante la démarche personnelle de recherche incessante du Royaume : de trie continue des poissons qui se sont retrouvés dans notre filet de pêche, de possibilité réelle de garder les bons poissons pour nourrir, mais aussi de jeter les mauvais au feu.

Une des déclarations de foi de l’Église Unie reprend bien la démarche que nous sommes appelés à faire ensemble afin de vivre, de construire ce Royaume qui nous est accessible et qui nous est promis. Elle nous rappelle que nous constituons l’Église « pour célébrer la présence de Dieu, pour vivre avec respect dans la création, pour aimer et servir les autres, pour rechercher la justice et résister au mal, pour proclamer Jésus, crucifié et ressuscité».

Nous vivons dans un monde difficile, rempli des défauts intrinsèques des humains, des désastres naturels, des affres de la pauvreté, des injustices et de la maladie. Toutefois, Dieu nous assure de son amour, nous offre son espérance et nous propose une démarche. Une démarche qui ne s’achète pas au magasin du coin, dans un grand restaurant dispendieux, ou dans une agence de voyages. Il s’agit d’une démarche personnelle où notre jugement est mis à profit et où l’inspiration divine nous guide.

Est-ce un bon poisson ou un mauvais ? Comment savoir s’il s’agit d’un bon poisson. Si c’est un mauvais, comment m’en départir ? Les anges de Dieu, l’esprit sain, la force du Dieu d’amour !

Et si c’est un mauvais poisson, suis-je capable de laisser humblement les anges faire le travail… même si, à court terme, ça peut me faire grincer des dents ou même me faire pleurer.

Oui, me faire grincer des dents, car faire le ménage dans notre vie, se départir des mauvaises habitudes, se réconcilier avec les autres, poursuivre sans cesse la démarche pour vivre le Royaume, ce n’est pas toujours simple et c’est parfois difficile et douloureux.

Penser aux défis personnels que nous avons tous, des défis parfois assez simples, d’autres fois très compliquées à relever, et ce, dans différents domaines de notre vie : la saine alimentation, la propreté de nos maisons, l’accueil des autres, la consommation responsable de l’alcool, les habitudes de jeu et de divertissement, les achats de biens et de services, l’engagement citoyen en faveur du bien et de la justice, les relations intimes.

Mais, la promesse de Dieu, c’est qu’il sera toujours là. Il sera auprès de nous. Il sait que la démarche est loin d’être simple et qu’elle n’est pas toujours facile. C’est pourquoi nous sommes invités à faire la démarche ensemble, en communauté, et ce, dans l’assurance de la présence aimante de Dieu. La fin de notre déclaration de foi en fait d’ailleurs écho : « Dans la vie, dans la mort, et dans la vie au-delà de la mort, Dieu est avec nous. Nous ne sommes pas seuls. »

Finissons avec ce rappel du texte de l’évangéliste Matthieu qui nous rappelle encore que cette démarche est simple : « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et ce que Dieu demande. Il vous donnera tout le reste en plus. » (Matthieu 6 :33) Je vous invite donc à vivre votre marche vers le Royaume de Dieu dans cette espérance, je vous invite à marcher avec vos frères et sœurs, et ce, dans l’amour, la confiance et la joie. Je vous invite à trouver le bonheur, un bonheur durable qui repose sur “ la liberté intérieure, la sérénité, la force d’âme, et l’amour altruiste, un altruisme qui rayonne vers l’extérieur au lieu d’être centré sur soi”[3].

Amen.

[1] Mon ajout

[2] https://www.matthieuricard.org/blog/posts/hedonisme-et-eudemonisme-bonheur-et-plaisir-la-grande-confusion-partie-2

[3] Voir note précédente

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