Le Israélites partirent … mais le peuple perdit courage en chemin. » Ils perdirent courage en chemin? Je comprends! Ça fait 40 ans qu’ils sont partis d’Égypte sous la direction de Moïse! Ils ont déjà surmonté des obstacles majeurs, contourné des problèmes, affronté des hostilités. Moi, une heure poignée dans le trafic, à avancer à pas de tortue, quelques détours pour contourner des travaux routiers…et je perds patience! Et si on parle de mes méandres existentielles…ce n’est guerre mieux. Quelques semaines, à la limite quelques mois, à voir ma terre promise sans pouvoir pour autant m’y rendre…et oui…je suis plus qu’impatiente. « Que s’est qui se passe ENCORE? Seigneur, qu’est-ce que t’attends?! Oui, je tiens de mes ancêtres dans la foi…comme dans le doute! Comme eux, je sais tout ce que Dieu a fait pour moi / pour nous par le passé. Je sais que, dans le désert, Dieu pourvoit…mais j’ai besoin de me le rappeler…encore et encore. Et je perds courage des fois. Comme nous toutes et tous, n’est-ce pas, quand notre vie ressemble à une longue traversée dans le désert: lorsque nous n’en pouvons pu des délais, des détours, des réaménagements… quand une épreuve devient trop longue, qu’on n’en voit plus le bout. Qui n’a pas déjà perdu courage ? Les Psaumes sont pleins de ces cris d’impatience, quand l’épreuve se fait trop lourde : « Jusqu’à quand, Seigneur, jusqu’à quand ? Perdre courage, c’est tout a fait humain…tellement humain. Et je dirais…tout à fait sain dans de telles circonstances. Alors pourquoi Dieu enverrait-il des serpents contre son peuple ? La pasteure suisse Alice Duport l’explique ainsi :
“Ce n’est pas l’impatience du peuple qui est offense à Dieu. Mais c’est d’avoir détourné la confession de foi, de l’avoir « tordue » : Le Dieu qui libère et fait vivre, devient dans la bouche des impatients, le Dieu qui fait mourir. La manne, pain de vie venu du ciel, signe de la providence divine, devient « un pain de misère ». Autrement dit, ce que Dieu fait de bon est détourné. Sa parole et sa bonté sont déformées, tordues… En hébreu, le serpent est appelé « le tordu ». La Parole de Dieu est droite : le Malin la tord, la déforme. Voilà la faute des Israélites qui ont perdu patience : ils tordent la vérité de leur libération, ils déforment leur foi en Dieu.”
Et il ne faudrait pas que nous tordons la Parole en réduisant cette histoire à une illustration de la nature (un peu) trop humaine de Dieu…qui lui aussi peut « peter une coche, perdre patience, et aller trop loin avec ses enfants (parfois) ingrats. Mais où est l’Évangile là-dedans ? L’Évangile où Jésus lui-même nous déclare que Dieu n’a pas envoyé son fils dans le monde pour juger le monde mais pour qu’en lui, nous ayons la vie éternelle. Or, dans l’Évangile, la vie éternelle, c’est connaître Dieu, se rapprocher de l’Éternel, vivre dans l’intimité, en communion avec Dieu…quelles que soient les circonstances dans lesquelles on se trouve…dans la vie, dans la mort et dans la vie au delà de la mort.
Oui, il y aura des serpents sur notre chemin…et la mort, même si certains la déjoueront pendant un certain temps, elle est tout de même un passage obligé pour nous toutes et tous. Mais même là, nous ne sommes pas privés de la présence bienveillante de Dieu. C’est pour cela que le fils a dû être élevé sur la croix. Pour que nous sachions que même là, nous ne sommes pas seuls. Dieu est avec nous.
L’envoi des serpents est, me semble-t-il, moins une illustration de la « sainte colère » de Dieu et plus une démonstration de la façon dont il nous guérit. Dieu dit à Moïse de fixer un serpent de bronze à une hampe. Il suffit de lever les yeux et de le regarder pour être guéri. C’est le principe des vaccins et toutes les thérapies en faite. Le remède a la même forme que le mal qui nous menace. On accède à la vie, en acceptant de regarder en pleine face ce qui nous fait peur. Il suffit de lever les yeux. C’est aussi simple…et difficile que cela. C’est difficile parce que, quand on a peur, quand on a mal, notre premier réflexe est de baisser les yeux, nous replier sur nous-mêmes pour nous protéger. Mais souvent, ça finit par nous figer dans notre mal. Pour s’en sortir, il faut levez les yeux, regarder en avant. Il faut se le rappeler, se le répéter comme un mantra: devant Dieu, nous n’avons pas à nous protéger car Dieu n’a pas envoyé son fils dans le monde pour juger le monde mais pour que tous ceux et celles qui se tournent vers lui ait la vie éternelle.
Alors peuple de Dieu, levez les yeux et contemplez l’image de tout ce qui peut nous faire mal, nous faire peur, prenons courage et avançons ensemble sur le chemin de la Vie. Amen.
Sculpture de bronze sur le Mont Nébo en Jordanie. Source: Google Images. Cliquez ici pour regarder une video où on voit cette sculpture et les environs.
Darla Sloan, pasteure.
Le 15 mars 2015 – 4 Lent B15 – L’Église Unie St-Pierre
Lectures bibliques:
Psaume 107, 1-6 et 17-22
Nombres 2, 4-9
Jean 3, 1-3; 14-17
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