Non avec la tête, oui avec le cœur

Église Unie St-Pierre et Pinguet https://www.stpierrepinguet.org/wp

Christ est ressuscité! Oui, il est vraiment ressuscité! Mais, en fait, je n’y étais pas et vous non plus. On nous l’a dit et nous y avons cru. Vraiment? Enfin, nous voulons bien y croire, nous le souhaitons du fond du cœur. À l’époque où notre société était, pourrait-on dire, une serre chaude où tout le monde avançait au même pas, le poids du nombre et la force de l’habitude rendaient l’adhésion ‘religieuse’ normale sinon facile. Et lorsque des objections intellectuelles ou historiques montaient, il y avait des réponses convenues qui devaient nous satisfaire, un point c’est tout. Ceux et celles qui osaient poursuivre le questionnement étaient considérés avec méfiance, des esprits rebelles, évidemment gonflés d’orgueil, vraisemblablement séduits par le Malin et probablement en proie à des péchés et des déviances morales qui les faisaient glisser sur la pente de la perdition. Il fallait éviter toute contamination du groupe majoritaire. De deux choses l’une : se conformer ou s’exclure. Alors, plusieurs faisaient ainsi que chantait Claude François il y a 50 ans, dire oui avec la tête, dire non avec le cœur.

Heureusement pour nous, Thomas, l’apôtre fougueux prêt à foncer tête baissée1, a plutôt fait le contraire : dire non avec la tête, dire oui avec le cœur, comme un écho prémonitoire d’un poème de Jacques Prévert. Thomas exige la cohérence : seules les marques sur le corps du supplicié peuvent attester la vérité de cette invraisemblance du retour à la vie d’un mort, si aimé soit-il. Notez bien que le texte dit Jésus vint puis que les onze déclarent à Thomas absent : Nous avons vu le Seigneur2! Dans l’évangile de Jean, le symbolique prime sur l’historique, clé de lecture primordiale pour aborder ce texte, tout comme le texte de l’Apocalypse qu’on attribue aussi au même auteur. Le temps passe, la même durée que le temps écoulé depuis dimanche dernier, un octave, un cycle complet. Ce passage du temps n’évoquerait-il pas la durée donc la distance que nous vivons nous-mêmes par rapport à cet évènement fondateur, entre l’expérience des premiers témoins et la nôtre?

Les extraits de la Bible inspirant cette réflexion sont donnés à la toute fin de la prédication. Vous pouvez cliquer sur les liens pour lire les extraits.

Puis, à nouveau, Jésus vint et se tint au milieu d’eux3. Et avec la déclaration de paix qu’il prononce se rajoute cette fois une invitation à ce que Thomas aille au bout de sa logique du ‘toucher’ pour délaisser l’enfermement de l’incrédulité et ainsi devenir disponible et perméable, un homme de foi4. Monte alors aux lèvres du sceptique, tel un cri, un oui du cœur : Mon Seigneur et mon Dieu5. Car Thomas vient d’accéder, par son ouverture, à la dimension hors du temps et de l’espace de celui qui vient au milieu des nuées, que tout œil verra, même ceux qui l’ont percé6 […] l’Alpha et l’Oméga […] celui qui est, qui était et qui vient, le Tout-Puissant7. Merveilleux doute de Thomas qui nous révèle ainsi la validité de tout questionnement sincère, l’authenticité simple et candide comme l’indispensable prérequis à l’expérience spirituelle chrétienne. Les blessures de Jésus, son amour solidaire qui le conduit à subir l’injustice scandaleuse et l’ignoble torture, cela demeure encore et toujours un témoignage fidèle du dessein divin envers l’humanité et le monde : celui qui nous aime, qui nous a délivrés de nos péchés par son sang, qui fait de nous un royaume pour Dieu, son Père8.

Alors, bien sûr, ni vous ni moi n’y étions. Et pourtant, nous croyons, un peu, beaucoup, cela dépend des jours et des moments. Mais notre intuition nous amène à concevoir que ce témoignage à la vie, l’enseignement, la passion puis la résurrection de Jésus, transmis de générations en générations, pointe dans la direction du sacré, de la profondeur des choses, du sens véritable de l’existence, de notre vie personnelle comme du destin de l’humanité et du monde. L’annonce de la Bonne Nouvelle, l’Évangile, est un catalyseur qui active un phénomène spirituel qui ne s’arrêtera plus. La mort même n’a plus le dernier mot. Uni par la foi au Christ, nous avons à assumer la plénitude de ce que cela implique dans notre vie présente, à risquer le tout pour le tout dans nos engagements, dans nos amours, dans nos solidarités car ce qui est sien est désormais nôtre, membres de son corps. En vérité, en vérité, à lui gloire et pouvoir pour les siècles des siècles9. Alors oui, avec le cœur et de tout cœur, bienheureux ceux qui, sans avoir vu, ont cru10. Christ est ressuscité. Oui, il est vraiment ressuscité. Amen.

Église Unie Saint-Pierre – 2e dimanche de Pâques C – 28 avril 2019

 

LECTURES BIBLIQUES

Psaume 150

Apocalypse 1, 4-8

Jean 20, 19-31

1 Voir Jean 11, 16

2 Jean 20, 24-25

3 Jean 20, 26

4 Jean 20, 27

5 Jean 20, 28

6 Apocalypse 1, 7

7 Apocalypse 1, 8

8 Apocalypse 1, 5b-6a

9 Apocalypse 1, 6b

10 Jean 20, 29b

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