St-Pierre / 22^e de Pentecôte « A » 9 novembre 2014 > Dimanche du Souvenir

Psaume 78, 1-7

1 O mon peuple, écoute ma loi, tends l’oreille aux paroles de ma bouche. 2 Je vais ouvrir la bouche pour une parabole et dégager les leçons du passé. 3 Ce que nous avons entendu et connu, ce que nos pères nous ont transmis, 4 nous ne le tairons pas à leurs descendants,

mais nous transmettrons à la génération suivante les titres de gloire du SEIGNEUR, sa puissance et les merveilles qu’il a faites. 5 Il a fixé une règle en Jacob, établi une loi en Israël. Elle ordonnait à nos pères d’enseigner ces choses à leurs fils, 6 afin que la génération suivante les apprenne, ces fils qui allaient naître : Qu’ils se lèvent et les transmettent à leurs fils ; 7 qu’ils mettent leur confiance en Dieu, qu’ils n’oublient pas les exploits de Dieu, qu’ils observent ses commandements…

Livre de la Sagesse 6, 12-20

12 La Sagesse brille et ne se flétrit pas, elle se laisse voir aisément par ceux qui l’aiment
et trouver par ceux qui la cherchent.
13 Elle devance ceux qui la désirent, en se faisant connaître la première.
14 Quiconque part tôt vers elle ne se fatiguera pas : il la trouvera assise à sa porte.
15 Se passionner pour elle, c’est la perfection du discernement.
Et quiconque aura veillé à cause d’elle sera bientôt sans inquiétude,
16 car, de son côté, elle circule en quête de ceux qui sont dignes d’elle, elle leur apparaît avec bienveillance sur leurs sentiers et, dans chacune de leurs pensées, elle vient à leur rencontre.
17 Le commencement de la Sagesse, c’est le désir vrai d’être instruit par elle,
18 vouloir être instruit, c’est l’aimer, l’aimer, c’est garder ses lois,
observer ses lois, c’est être assuré de l’incorruptibilité,
19 et l’incorruptibilité rend proche de Dieu.
20 Ainsi le désir de la Sagesse élève jusqu’à la royauté.

Matthieu 25, 1-13

1 « Alors il en sera du Royaume des cieux comme de dix jeunes filles qui prirent leurs lampes et sortirent à la rencontre de l’époux. 2 Cinq d’entre elles étaient insensées et cinq étaient avisées. 3 En prenant leurs lampes, les filles insensées n’avaient pas emporté d’huile ; 4 les filles avisées, elles, avaient pris, avec leurs lampes, de l’huile dans des fioles. 5 Comme l’époux tardait, elles s’assoupirent toutes et s’endormirent. 6 Au milieu de la nuit, un cri retentit : “Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre.” 7 Alors toutes ces jeunes filles se réveillèrent et apprêtèrent leurs lampes. 8 Les insensées dirent aux avisées : “Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s’éteignent.” 9 Les avisées répondirent : “Certes pas, il n’y en aurait pas assez pour nous et pour vous ! Allez plutôt chez les marchands et achetez-en pour vous.” 10 Pendant qu’elles allaient en acheter, l’époux arriva ; celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces, et l’on ferma la porte. 11 Finalement, arrivent à leur tour les autres jeunes filles, qui disent : “Seigneur, seigneur, ouvre-nous ! ” 12 Mais il répondit : “En vérité, je vous le déclare, je ne vous connais pas.” 13 Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure.

Prédication : Sage comme l’Image

Vous souvenez-vous de l’expression « Sage comme une image » utilisée pour qualifier le comportement de jeunes enfants, souvent lorsqu’ils étaient gardés par une personne étrangère en l’absence de leurs parents? On ne sait trop à quelles images on fait référence (les images pieuses d’autrefois, dessins d’anges ou de saints aux couleurs pastelles éthérées) ou simplement à la dimension statique, silencieuse, d’un portrait peint ou d’une photographie. Enfin, l’idée était que l’enfant devait se tenir tranquille, ne pas être turbulent et obéir aux consignes. Ce qui serait récompensé par Père Noël, le temps venu..!

La sagesse biblique n’a rien à voir avec ce contrôle du comportement qui tient davantage de la répression que de l’intégration. La sagesse n’est pas l’abstention d’agir mais bien au contraire l’agir fondé sur la réflexion et l’expérience : celles qui nous ont été transmises par d’autres comme celles qui viennent de notre propre vie. La personne sage n’est donc pas immobile, silencieuse et statique mais bien attentive, réfléchie et engagée.

Les jeunes filles de l’histoire d’aujourd’hui vivent toutes la même réalité matérielle – dix jeunes filles prirent leurs lampes et sortirent à la rencontre de l’époux; comme l’époux tardait, elles s’assoupirent toutes et s’endormirent – un peu comme un ordinateur se met en veille lorsqu’on n’active pas le clavier pendant un certain temps. Ce qui les distingue c’est la façon dont elles se sont préparées : En prenant leurs lampes, les insensées n’avaient pas emporté d’huile ; les avisées, elles, avaient pris, avec leurs lampes, de l’huile dans des fioles. La sagesse prend forme ici d’agit prévoyant, car le minimum ne suffit pas pour faire face aux imprévus. …Achetez-en pour vous… Chacune doit avoir pour soi-même l’huile requise par le contexte spécifique dans sa situation propre. Les expédients de dernière minute, allez plutôt chez les marchands, ne fonctionnent pas, ce qu’illustre la finale de l’histoire de manière cinglante, comme une gifle : Pendant qu’elles allaient en acheter, l’époux arriva ; celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces, et l’on ferma la porte. “Seigneur, seigneur, ouvre-nous ! ” disent les retardataires. “En vérité, je vous le déclare, je ne vous connais pas.”

Comme dans les contes traditionnels, la fin de l’histoire est une leçon de vie : Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure. Et la sévérité de l’époux qui ne vous connait pas, une mise en garde du sérieux de l’enjeu. La conclusion nous laisse dans l’inquiétude, sinon dans l’angoisse : qui de nous est vraiment prêt? Avons-nous fait suffisamment de provision d’huile? Nos choix existentiels reflètent-ils la volonté divine sur nos vies?

Ce matin la bonne nouvelle de la grâce, l’Évangile, nous est transmis par l’extrait du livre de la Sagesse, inclus dans la Bible des juifs du bassin méditerranéen (la Diaspora) que n’utilisaient toutefois pas les juifs de la Palestine; ce qui fait que ce livre était mis en annexe sinon complètement disparu des éditions protestantes de la Bible. Avec le renouveau biblique et œcuménique du 20^e siècle, tous les chrétiens en ont repris la lecture, ce qui est une fort bonne chose. Cette Sagesse qui brille et ne se flétrit pas, qui se laisse voir aisément par ceux qui l’aiment et trouver par ceux qui la cherchent, qui devance ceux qui la désirent, en se faisant connaître la première, est reconnue comme l’Esprit du Christ ; inlassablement, l’Esprit vient à notre rencontre et propose sa tendre impulsion à notre âme et à notre conscience : une invitation à l’ouverture et au renouveau de la foi toujours dans le respect total de notre liberté. Quiconque aura veillé à cause d’elle sera bientôt sans inquiétude ; elle leur apparaît avec bienveillance sur leurs sentiers et, dans chacune de leurs pensées, elle vient à leur rencontre.

Ce matin nous sommes conviés à être sensés, à simplement désirer la sagesse, l’Esprit, et ainsi lui laisser toute la latitude pour agir. Sagesse divine pleinement disponible et offerte en Christ, l’Image de Dieu; par pure grâce nous est fournie ainsi une réserve illimitée d’huile pour les circonstances de nos vies. Nous n’avons pas, nous n’avons plus à faire semblant, comme si; ni à nous tenir tranquille dans la crainte de représailles, ‘sages’ comme des images. Nous avons plutôt à nous ouvrir avec audace et joyeuse créativité aux possibilités innombrables de l’existence qui nous est donnée, à tout risquer puisque nous sommes précédés par le Fils de notre salut et que, par le don de sa bienveillance, nous devenons de plus en plus comme lui, sage comme l’Image. Amen.

Denis Fortin, pasteur

9 novembre 2014