« Grande est la gloire du SEIGNEUR ! Si haut que soit le SEIGNEUR, il voit le plus humble et reconnaît de loin l’orgueilleux. » 1
Une projection idéalisée de soi dans un monde de rêve et de fabulation. Voilà ce qu’est l’expérience religieuse au dire de bon nombre de nos contemporains, de nos voisins. Ou sinon, un embrigadement idéologique qui oblige des comportements et impose des valeurs muselant ainsi la liberté et la responsabilité de personnes timorées qui ont besoin de se faire dire quoi faire et quoi penser.
En est-il vraiment ainsi? Ce n’est pas le genre de religion que je vis bien que ce soit trop souvent l’étiquette qu’on accole à ma foi, « affaire réglée, achale-nous plus avec ça! » Évidemment si je suis ici ce matin c’est parce que j’ai la conviction que l’expérience spirituelle à la suite de Jésus est plus qu’un vœu pieux et que, bien au contraire, ma liberté y trouve un espace toujours plus grand pour se déployer. La référence à Dieu, à la Seigneurie du Créateur – bien que, je le concède, le terme soit vieillot et ait des résonances aristocratiques passéistes – n’a rien à voir avec une quelconque tutelle ou curatelle permanente dans ma vie. En y pensant, c’est tout le contraire. Me référer à l’Éternel Dieu à la manière de Jésus le Christ, c’est en fait pouvoir prendre du recul sur ma situation immédiate, une distance critique, acquérir une perspective d’ensemble sur ma vie personnelle en interaction avec les autres et le monde. Si haut que soit le SEIGNEUR, il voit.2 Et pouvoir porter un regard lucide et nuancé sur soi-même et les situations dans lesquelles on se trouve, c’est le fondement indispensable de toute avancée libre et constructive dans une vie que l’on souhaite authentique et engagée.
Les extraits de la Bible inspirant cette réflexion sont donnés à la toute fin de la prédication. Vous pouvez cliquer sur les liens pour lire les extraits. |
Dieu est si loin mais pourtant le royaume [le règne] de Dieu est parmi / au milieu / à votre portée / en vous,3 annonce l’Évangile. Véritablement, on peut qualifier le culte dominical, les disciplines spirituelles et la vie de prière de pratiques de « pleine conscience » pour faire nôtre le vocabulaire psycho-spirituel d’aujourd’hui. La finalité du culte est de revenir à ce qui devrait être et demeurer au quotidien une évidence. Je vous rappelle l’Évangile que je vous ai annoncé, que vous avez reçu, auquel vous restez attachés, et par lequel vous serez sauvés si vous le retenez tel que je vous l’ai annoncé.4 L’Évangile donne accès au salut, un don gratuit, toujours immérité mais oh ! combien bénéfique pour le cœur comme pour le corps : guérison, pardon, miséricorde, espérance, vie inépuisable. Le bonheur tant recherché y trouve sa source intarissable, et une fécondité constamment renouvelée. Rappelons-nous le et osons vivre en conséquence.
Bon, c’est formidable me direz-vous, mais… la vie de tous les jours ne ressemble-t-elle pas justement à cette petite entreprise de pêche de Simon et compagnie, à tous ces gestes du quotidien répétés des milliers de fois, travail ardu, épuisant, souvent bien peu fructueux par rapport aux efforts consentis. Alors que le découragement guette les plus vigoureux, c’est là que la rencontre de Jésus peut faire encore et fera toujours une différence. Maître, nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre ; mais, sur ta parole, je vais jeter les filets.5 Alors tout à coup on découvre, que la profondeur véritable des situations et des êtres est là, ici et maintenant, à portée de filets. Dieu est si proche. Cette expérience vertigineuse de revirement impensable d’une situation, de conversion radicale de point de vue et de perspective, jette à terre nos idées préconçues, nos préjugés, confronte nos paresses et nos lâchetés, et nous conduit à un lâcher-prise de notre identité de surface, de notre petit ou faux moi. Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un coupable.6 Et cette proximité du SEIGNEUR, qui voit le plus humble et reconnaît de loin l’orgueilleux,7 elle est infiniment bienveillante et aussi tendre qu’irrésistible : Sois sans crainte, désormais ce sont tes semblables, des hommes et des femmes, que tu auras à capturer.8
Jésus introduit désormais la grande gloire de Dieu dans la banalité des gestes quotidiens, si proche. Nous n’avons pas à nous élever vers la cour céleste où trône le Souverain, Créateur des univers, avec crainte et tremblements, si loin. En Jésus, Dieu se révèle compagnon de toutes nos routes et sauveur par pure grâce de tous nos maux et toutes nos impasses. Le Dieu que nous confessons selon l’Évangile est le Dieu qui libère et qui affranchit, qui nous conduit à actualiser notre plein potentiel et à assumer notre responsabilité pleine et entière, dans la vérité sur nous-mêmes, autant quant à nos limites et nos fautes, que dans notre valeur et la noblesse de nos gestes. Oui, Saint, saint, saint, le SEIGNEUR de l’univers, sa gloire remplit toute la terre ! 9 Le jour où j’ai appelé, tu m’as répondu, tu as stimulé mes forces.10 Le SEIGNEUR fera tout pour moi, ta fidélité est pour toujours11. Mais ce que je suis, je le dois à la grâce de Dieu et sa grâce à mon égard n’a pas été vaine.12 Si loin, si proche… Amen.
Église Unie Saint-Pierre Épiphanie 5 « C » – 10 février 2019
LECTURES BIBLIQUES
1 Psaume 138, 5b-6
2 Psaume 138, 6a
3 Luc 17, 21
4 1 Corinthiens 15, 1-2b
5 Luc 5, 5
6 Luc 5, 8
7 Psaume 138, 6
8 Luc 5, 10b
9 Ésaïe 6, 3b
10 Psaume 138, 3
11 Psaume 138, 8
12 1 Corinthiens 15, 10
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