Nous voici à la mi-temps de l’été, avec tout le plaisir de pouvoir vivre davantage à l’extérieur, de se laisser caresser par le vent et le soleil, et l’eau lors des baignades bienfaisantes les jours de grande chaleur. La lumière ruisselle et danse à travers le feuillage des arbres qui nous procurent généreusement ombre et fraîcheur. Et comment ne pas être transporté de joie en savourant les légumes frais et les fruits tout juste récoltés de ce temps d’abondance. Ceux et celles d’entre nous qui ont pu faire le voyage à Pinguet la semaine dernière ont constaté encore une fois la beauté et la grandeur de la région dans laquelle nous résidons. Quel privilège, quel bonheur. Regarder sous cet angle, on croirait aisément que la vie est un long fleuve tranquille. Dans la parabole de Matthieu, ce serait le bon grain dans le champ qui pousse et produit l’épi.
Les extraits de la Bible inspirant cette réflexion sont donnés à la toute fin de la prédication. Vous pouvez cliquer sur les liens pour lire les extraits. |
Mais alors apparut aussi l’ivraie, poursuit la parabole. Nous ne le savons que trop bien, les doux moments de l’été avec leurs joies bien réelles et le sentiment de plénitude qui les accompagnent, ne peuvent empêcher la souffrance et le mal de s’immiscer sournoisement et d’essayer de corrompre la beauté et la bonté de ce que le Fils de l’homme a semé. À petite comme à grande échelle, dans nos vies personnelles et collectives, croissent ensemble, entrecroisées, l’ivraie et le blé. Ah ! comme j’aimerais pouvoir en finir une fois pour toute avec la mauvaise herbe qui pousse en moi comme dans le monde qui m’entoure. Et pourtant le maître de la maison déclare : Laissez l’un et l’autre croître ensemble jusqu’à la moisson, de peur qu’en ramassant l’ivraie vous ne déraciniez le blé avec elle. Ce sens pratique du maître agriculteur est le point de vue que nous sommes invités à adopter dans cette lutte jamais terminée contre les mauvaises herbes. Éviter leur prolifération, bien sûr, mais pas au risque d’endommager irrémédiablement la moisson à venir. Mais alors, comment ne pas perdre courage, ne pas s’épuiser à résister ou finalement abandonner la tâche devant l’omniprésence de l’adversité, de l’anti-vie, de la lutte entre les sujets du Royaume et les sujets du Malin, qui paraît constamment mettre en échec les avancées du Règne de Dieu?
Il me semble que ce matin, c’est de la lecture du premier testament, du rêve de Jacob, que nous vient l’Évangile, la clé de grâce et d’espérance pour notre avancée quotidienne sur le sentier de notre existence. Jacob lui-même est en déplacement et se retrouve surpris par le coucher du soleil en un lieu où il passa la nuit. Pas plus que nous, Jacob ne contrôle les évènements : il compose au mieux avec la situation, utilise sa créativité pour aménager les choses. Il prit une des pierres de l’endroit, en fit son chevet et coucha en ce lieu. Dormir à la belle étoile en ce temps-là, sous ces latitudes, n’était pas exceptionnel. Mais Jacob eut un songe, et ce rêve-là n’avait rien de banal : voici qu’était dressée sur terre une échelle dont le sommet touchait le ciel ; des anges de Dieu y montaient et y descendaient. Cette circulation entre le ciel et la terre est une réalité spirituelle, invisible mais bien réelle, qui s’expérimente au niveau de l’intuition, de l’inconscient, le domaine du sommeil et des songes, de la méditation et de la prière. Je suis le SEIGNEUR, Dieu […] La terre sur laquelle tu couches, je te la donnerai; en toi et en ta descendance seront bénies toutes les familles de la terre. Vois ! Je suis avec toi et je te garderai partout où tu iras.
À son réveil, Jacob est profondément bouleversé : Ce lieu est redoutable ! C’est la maison de Dieu, la porte du ciel. Le SEIGNEUR est ici et je ne le savais pas! Les promesses et récits du premier testament trouvent leur réalisation et leur permanence à la lumière de la vie, la mort et de la résurrection de Jésus, pour nous chrétiens. Ce ne sont désormais plus des réalités géographiques ou nationales, mais concernent toutes les familles de la terre, sans égard à la nationalité, à l’appartenance ethnique ni même ultimement à l’affiliation religieuse. L’expérience de Jacob évoque une réalité spirituelle continue, une communication initiée par Dieu. Comme la sonnerie d’un téléphone nous indique que quelqu’un appelle, au plus profond de nous Dieu nous invite à décrocher à dire « Allo, oui ». Entende qui a des oreilles…
En attendant la moisson finale, en union au Christ cosmique par la confiance de la foi, prenons conscience que nous avons déjà accès à la porte du ciel et que là où nous nous trouvons, le Seigneur est toujours là, c’est la maison de Dieu. Imprégnons-nous de cette vérité, ne laissons pas l’ivraie ravir la joie des moments de croissance du bon grain de nos vies, et trouvons notre paix et notre espérance en regardant les beautés de la nature et en sachant qu’en nous comme dans tous les atomes de la matière une échelle est dressée; son sommet touche le ciel et les anges de Dieu y montent et descendent. La moisson appartient au maître, Dieu conduit tout à terme dans la puissance de son amour créateur. Tout cela c’est la grâce imméritée, offerte sans condition, à tous et chacune, l’infinie miséricorde du Père dans le Fils par l’Esprit. Quel songe merveilleux pour toutes nos nuits d’été. Amen.
Par Denis Fortin, pasteur
Église Unie Saint-Pierre / 7e de Pentecôte « A » 23 juillet 2017
Un commentaire
Quelle belle méditation, équilibrée, réaliste et pleine d’espérance. Merci Denis!