Tel que nous sommes, tel que nous serons

Église Unie St-Pierre et Pinguet https://www.stpierrepinguet.org/wp

Vous savez, je ne suis peut-être pas une demoiselle, mais je suis certain que le temps d’une gestation doit non seulement créer de la joie… mais aussi beaucoup d’attentes ! J’imagine les papas et les mamans qui, dès le résultat positif du test de grossesse, s’imaginent déjà la vie de leur enfant. Un beau p’tit garçon au visage rose, les belles soirées chez mamie et papi, une petite fille à la personnalité calme et sans histoire et, pourquoi pas déjà, un certain choix de carrière pour notre enfant ! Du moins, c’est mon intuition à voir toute l’importance que ce dernier point prenait dans mon propre entourage.

Avoir des enfants engendre malgré nous pas mal d’attentes, n’est-ce pas ? Je crois que c’était aussi le cas de Marie. Il faut se le dire : l’ange a mis la barre haute quant au « choix de carrière » de son fils ! À la mère de Jésus, il affirme : « Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père… il régnera pour toujours sur la famille de Jacob. » Ça… ça doit générer des drôles d’attentes chez une maman ! Toutefois, comme vous pouvez peut-être vous en douter, il y a quelques petits soucis concernant les prédictions de l’ange. Premièrement, Jésus n’a pas occupé ou revendiqué le trône de David au cours de sa vie et ne fait toujours pas consensus dans la grande tradition du monothéisme. Serait-ce que l’ange s’est trompé de bébé ? On pourrait bien sûr spiritualiser de midi à quatorze heures pour essayer de justifier les propos de l’ange, mais ce n’est pas l’enjeu qui m’intéresse ici. De tels propos, qu’on le veuille ou non, créer des attentes quant à l’avenir et, potentiellement, des conflits.

Si on se fie aux Évangiles, Jésus n’est pas sans avoir eu quelques soucis avec sa famille. Imaginez-vous un instant à sa place. Si Marie s’imaginait qu’elle avait donné naissance à un nouveau Josué, elle a sûrement dû déchanter. Jésus n’a rien d’un conquérant militaire et n’a pas été non plus le roi de quelconque royaume ici-bas. Mais… pourrait-on en vouloir à Marie de se faire des attentes ?Souvenons-nous dans quel environnement elle a vécu sa gestation, mettons-nous à sa place un instant. Lorsqu’une personne vit au milieu des conflits et qu’elle est sans cesse confrontée à l’insécurité, elle ne peut pas faire autrement que de développer des attentes… ou interpréter les propos de Dieu selon ses besoins fondamentaux. Dans un tel cas, je peux comprendre Marie qui pourrait s’être attendue à un nouveau Josué qui libèrerait son peuple par la force. Je peux comprendre ses attentes déçues et les incompréhensions qui ont eu lieu plus tard entre elle et Jésus.

Vous savez, comme communauté, nous aussi on s’est construit des attentes sur fond d’insécurité. Se pourrait-il que vous ayez vous aussi observé quelques signes ? C’est vrai que, un temps de transition pastorale, ça peut nous déstabiliser et nous rendre à fleur de peau. Dans un tel moment de gestation qui est toujours difficile, nous sommes davantage à risque de nous blesser les uns et les autres par des gestes et des paroles. Des paroles et des gestes qui, cela dit, traduisent notre insécurité vis-à-vis de l’avenir. Lorsque nous portons la pression de nos propres attentes, il y a toujours un risque que la tension abîme ces relations qui nous unissent. Là-dessus, Dieu sait que les Évangiles nous parlent parfois de la famille de Jésus comme d’une famille fracturée par l’incompréhension ! Un enfant différent et qui ne correspond pas aux attentes constitue un enfant incompris et isolé.

Marie et le reste de sa famille apprendront à laisser Jésus être tel qu’il est, tel qu’il sera… Dans un même ordre d’idée, le temps de l’Avent nous invite à nous accueillir tel que nous sommes, tel que nous serons…

Heureusement, pour éviter de nous enliser dans la division, il suffit de nous rencontrer et d’établir entre nous un dialogue franc. Nommer nos craintes et faire éclater le silence saturé fait toute la différence. À ce propos, j’imagine volontiers que Jésus a dû faire de même un moment donné avec sa mère, question de mettre les pendules à l’heure quant à sa vocation qui était continuellement incomprise.

Bien sûr, nous n’échappons pas aux attentes qui naissent des circonstances dans lesquelles nous évoluons. Seulement, plutôt que de nous laisser piéger par nos attentes qui deviennent des croix, prenons le temps de vivre notre moment de gestation par l’entremise du dialogue.

Que ce temps de l’Avent soit une occasion pour nous accueillir tel que nous sommes et non pas selon ce que nous voudrions être. En ce qui concerne notre avenir, Dieu se chargera des jours à venir. Une gestation prend du temps et exige bien des efforts, mais elle se termine, Dieu le voulant, par une naissance qui change nos vies.

Amen

LECTURES BIBLIQUES

Luc 1, 16-38

Éphésiens 4, 1-10

 

Un commentaire

Ajouter un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *