« [Les disciples] s’étaient querellés pour savoir qui était le plus grand. » (Marc 9, 34) Me semble que je les entends. Simon – qui jusqu’à ce moment-ci n’hésite pas à se mouiller, se lance : « Bon… Jésus m’a donné le nom de Pierre. De toute évidence, il sait que j’ai le plan le plus solide sur lequel bâtir l’avenir de notre communauté. » Et Jacques et Jean, les fils de Zébédée de répondre : « Nous, nous avons toujours travaillé en équipe. C’est ce genre de coalition qui correspond le mieux à la vision de Jésus. » Et Matthieu l’ancien collecteur d’impôt de souligner qu’il est le mieux placé pour gérer l’économie. Après tout, toute communauté a besoin de reins financiers solides pour avancer.
Plus ça change…. Depuis la nuit des temps, les grands de ce monde se disputent la première place… sont prêts à tout pour se hisser au-dessus de la mêlée. N’est-il pas temps que les choses changent vraiment ? Ne sommes-nous pas dus pour un bouleversement de l’ordre établi ?
Jésus avait déjà dit à ses premiers disciples que le chemin de la croix était un passage obligé pour quiconque voulait le suivre (Marc 8, 31-36). Ce matin, il poursuit son enseignement en disant : « Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous. » (Marc 9, 35)
Ok… là… ça me stresse… Faut être le serviteur de tous… Et les besoins sont tellement énormes… partout. Faut faire quelque chose… préparer un plan… passer à l’action…. Rien qu’à y penser… je suis épuisée et découragée… au bord du burn-out. La communauté des disciples est petite. Et là, je ne pense pas uniquement à notre charge pastorale, l’Église est petite. Ses moyens modestes. Elle n’a plus beaucoup de pouvoir dans la société. Être les serviteurs et les servantes de toutes et tous… voyons donc, Jésus ! Mais peut-être que je comprends mal… comme Pierre, Jean, Jacques et tous les autres ont tous mal compris à un moment donné.
Autant les disciples sont durs de comprenure, autant Jésus est bon pédagogue et d’une patience sans bornes. Il accompagne son enseignement d’une illustration. Pendant que tous les yeux sont fixés sur lui, il nous fait un dessin. Une image qui vaut mille mots. (Ou 960 mots très exactement… selon le nombre de mots dans ma prédication !) « Et prenant un enfant, il le plaça au milieu d’eux et, après l’avoir embrassé, il leur dit : ‘Qui accueille en mon nom un enfant comme celui-là, m’accueille moi-même ; et qui m’accueille, ce n’est pas moi qu’il accueille, mais Celui qui m’a envoyé.’ » (Marc 9, 36-37).
Jésus prend un enfant, un petit serviteur, un petit esclave[1] dans ses bras… pose peut-être même un baiser sur son front. Geste empreint d’intimité, de tendresse, d’affection. Se trouver dans une relation d’intimité où on se sent en sécurité et en confiance et être touché avec tendresse et affection… C’est si simple et ça fait tellement de bien. Ça peut faire toute la différence dans une vie. C’est l’une des grandes leçons de la pandémie, n’est-ce pas ? (Bien que les plus petits et les plus vulnérables de nos sociétés le sachent depuis bien longtemps). Tisser avec d’autres des relations intimes, des relations de confiance. Toucher leur vie de tendresse et d’affection. Ce n’est pas plus compliqué que ça, être le serviteur ou la servante de tous. Et c’est à la portée de tous les disciples de Jésus, peu importe notre âge, notre statut social, nos moyens financiers, nos capacités physiques ou intellectuelles. Il me semble que cette image de Jésus avec cet enfant dans les bras en dit long sur le plan de Dieu, non pas pour quelques élus mais pour l’humanité et, en fait, pour la création tout entière.
Il est vrai que ce plan, l’Église n’a pas toujours su le mettre en action. Et pour dire vrai, elle a souvent fait tout le contraire. En contemplant le dessin que Jésus nous fait cette semaine, comment ne pas penser à tous ces enfants autochtones que l’Église n’a pas su accueillir avec tendresse et affection, comme Jésus nous montre à le faire ? L’histoire du Québec, du Canada et de bien d’autres nations auraient certainement été bien différente si on avait suivi son exemple. Mais nous ne sommes pas encore arrivés à la fin de l’histoire. Avec l’aide de Dieu, il n’est pas trop tard pour écrire un autre chapitre, bien différent des précédents.
Jésus, notre maître, et l’histoire de l’Église nous le démontrent clairement : ce n’est pas en essayant de s’emparer du pouvoir ou d’imposer un plan humain (politique, économique ou autre) que le monde va changer. Ce n’est qu’en se mettant au service du plan de Dieu qu’on trouvera la vie toujours nouvelle et éternelle. C’est en avançant – non pas les deux mains sur le volant, mais plutôt les deux yeux fixés sur Jésus – que s’ouvrira le chemin de à-venir de Dieu : la vie abondante pour la création tout entière.
C’est vrai, l’Église d’aujourd’hui est petite. Elle est comme un petit enfant, un petit esclave, un petit serviteur. Ses moyens sont modestes. Elle ne peut pas faire cavalier seul. Elle doit compter sur d’autres personnes et groupes de bonne volonté. Elle n’a plus beaucoup de pouvoir dans la société. Elle n’a presque plus voix au chapitre. Et c’est peut-être sa chance… ou une grâce particulière à accueillir. Ne serait-il pas temps de redevenir ce petit enfant, ce petit serviteur, cette petite servante qui se blottit contre Jésus, faisant le plein de son amour, de sa tendresse et de sa compassion afin de pouvoir en servir d’autres à son exemple ? À suivre… par la grâce de Dieu… Amen.
LECTURES BIBLIQUES
[1] La racine du mot grec qui est traduit par « enfant » dans la TOB peut aussi être traduit par « petit serviteur » ou « petit esclave ».
2 commentaires
Allo Darla ! J’ai bien aimé te lire avec la référence à l’enfant… Merci. J’ai trouvé ton partage fort juste. Bisous, et l’bonjour à la maisonnée !
Cher Richard,
Il me fait chaud au coeur de savoir que tu continues à nous suivre sur Internet et que cette prédication t’a rejoint. Toute notre affection, en Christ.